Qu'est-ce que Claude Riel a fait au petit bichon maltais de sa voisine, le 22 octobre 2008, pour que l'animal revienne extrêmement traumatisé, l'anus dilaté et ensanglanté, tout en dégageant une forte odeur de térébenthine?



Difficile de le dire exactement, car Riel nie avoir fait du mal à la petite bête. Il soutient qu'elle est entrée chez lui sans qu'il s'en rende compte pour se cacher sous le lit. Mais son histoire abracadabrante pour expliquer l'état lamentable du chien quand il l'a rendu à sa voisine n'a pas convaincu la juge de la cour municipale de Montréal. Au terme de son procès, au début du mois, l'homme de 56 ans a été déclaré coupable de cruauté envers l'animal.

Hier, la procureure de la Ville, Me Annie Roy, a demandé à la juge Marie Brouillet de condamner à 90 jours de prison ce résidant de Pointe-aux-Trembles. «C'est un peu fort, je ne peux pas aller en prison, c'est moi qui paie tout, chez nous!» a rétorqué Riel, qui est manoeuvre en construction et qui se défend lui-même. La juge doit rendre sa décision demain.

Au procès, Céline Michel, mère célibataire et propriétaire du chien en question, a raconté que, au moment des événements, elle habitait avec ses deux filles adolescentes au premier étage d'un immeuble de six logements sur la 99e Avenue. Riel était leur voisin de palier depuis environ cinq ans. L'après-midi du 22 octobre 2008, Mme Michel dit être sortie sur son balcon pour voir ce qui se passait, car elle voyait des déchets «revoler partout dans le stationnement». Riel, mécontent de trouver les ordures d'une autre voisine dans sa poubelle, avait décidé de les enlever de là. Depuis, il a réglé le problème en cadenassant sa poubelle.

Quoi qu'il en soit, ce jour-là, Mme Michel a jugé qu'il était un peu fou et est rentrée chez elle. Plusieurs minutes plus tard, elle a constaté que Baby, son bichon maltais d'un an et demi, n'était plus dans la maison. Elle l'a cherché partout, dedans comme dehors, mais ce n'est qu'après environ deux heures qu'elle a vu Riel sortir de chez lui avec le chien dans les mains. Mme Michel s'est précipitée, en larmes. La bête, qui semblait terrorisée et tremblait de tous ses membres, a déféqué sur Mme Michel. Il y avait aussi du sang et du liquide qui avait une forte odeur de térébenthine, se souvient Mme Michel. Elle a lavé le petit chien et constaté que son anus était énorme. «Je ne veux pas être vulgaire, mais j'aurais pu entrer ma main facilement», a-t-elle dit avec émotion devant la juge.

Mme Michel a appelé la police. L'agent Jérôme Tremblay s'est rendu sur place avec des collègues. Il a constaté que le chien tremblait comme une feuille et qu'il avait «quelque chose d'assez énorme au derrière, de pas normal». Il s'est rendu chez M. Riel. Il y avait des bières et un pot de Vaseline ou de Vicks VapoRub sur la table. M. Riel semblait ivre, il déparlait. Il a dit que le chien s'était faufilé chez lui sans qu'il s'en aperçoive.

Mme Michel a emmené son chien dans une clinique vétérinaire le même jour. La Dre Mélissa Jeannotte a noté que la petite bête dégageait une forte odeur de produit chimique et que son anus était très dilaté. Elle a conclu que quelque chose était entré là, mais elle n'a pu dire quoi. La propriétaire du chien avait un budget modeste, ce qui limitait le type d'examens possibles, a signalé la vétérinaire. Elle a prescrit des médicaments pour prévenir les infections.

Chasse-moustiques

Pour sa défense, Riel a raconté que, ce jour-là, en l'absence de sa femme, il avait fabriqué du chasse-moustiques pour les pêcheurs en faisant chauffer du camphre avec de l'huile d'olive et du «liniment Ménard». Il est allé dans sa chambre pour verser le produit dans de petits pots et, ce faisant, en a échappé par terre. Le chien, qui était caché sous le lit, s'est sans doute assis dans la flaque, a-t-il supposé.

Il n'y a pas beaucoup de moustiques en octobre, a relevé la juge, qui n'a pas cru à l'histoire alambiquée de Riel. Ce dernier a été déclaré coupable de cruauté envers le chien, mais il a été acquitté de l'accusation d'empoisonnement, faute de preuve suffisante.

Après cet incident, Mme Michel et ses deux filles se sont empressées de déménager. Baby va mieux aujourd'hui, mais, selon sa maîtresse, il garde des séquelles, boite et a une peur bleue... des hommes.