Quand Sayon Camara a vu l'enveloppe de Citoyenneté et Immigration Canada dans sa boîte aux lettres, le 13 janvier, elle a été incapable de l'ouvrir. Elle craignait une mauvaise nouvelle. Cette nuit-là, elle a pleuré, sans oser dire à son mari la raison de son désarroi.

Ce n'est que le lendemain soir qu'elle s'est décidée à lui confier son secret. Son mari a ouvert la lettre. Puis, Abdoul Sow a annoncé à sa femme que les autorités fédérales avaient accepté sa demande de résidence permanente pour considérations d'ordre humanitaire.

«Il nous fait plaisir de vous informer qu'il y a suffisamment de motifs humanitaires et que la dispense est accordée», a lu Abdoul Sow, ému. Selon lui, sa femme satisfait toutes les conditions énumérées dans la lettre.

En écoutant son mari, Sayon Camara est restée muette, mais des larmes coulaient sur ses joues. «J'étais tellement contente que je n'y croyais pas», a dit Mme Camara, jointe hier dans son appartement de Saint-Léonard.

«Pendant deux heures, tout était calme dans la maison, a raconté Abdoul Sow. Puis, à minuit, elle a commencé à réaliser que c'était vrai, que ça finissait bien.»

L'histoire de cette Guinéenne de 43 ans a bien failli mal finir. En avril dernier, La Presse a révélé que le gouvernement du Canada comptait l'expulser malgré le fait qu'elle vivait une grossesse à risque.

Le 27 avril, jour prévu de son renvoi, la Cour fédérale lui a accordé un sursis, jugeant son état de santé préoccupant. Atteinte de diabète, Sayon Camara ne pouvait recevoir les soins dont elle avait besoin dans son pays natal.

Son fils, Mohamed Abdoul Latif, est né en juillet au terme d'une grossesse difficile. Le petit souffrait d'une malformation cardiaque à sa naissance. Les médecins l'ont suivi pendant plusieurs mois, mais le problème semble aujourd'hui réglé.

Sayon Camara risquait toujours l'expulsion. Le 21 décembre, elle a rencontré des agents d'immigration à Montréal pour l'analyse de sa demande de résidence permanente envoyée en 2008. Elle était accompagnée de son mari, de son avocat et de l'intervenante psychosociale Denise Côté.

«Nous nous réjouissons que les autorités aient eu la décence de corriger l'erreur qu'elles avaient commise», a dit Mme Côté, qui travaille pour le Mouvement contre le viol et l'inceste.

Mme Camara s'était fait refuser le statut de réfugié en 2007 malgré le fait qu'elle avait quitté la Guinée pour fuir un mari violent dont elle était la troisième femme. En 2008, elle a épousé Abdoul Sow, citoyen canadien d'origine guinéenne. Les autorités canadiennes ont refusé de reconnaître leur union, croyant que ce mariage visait à éviter l'expulsion de la femme.

«Aujourd'hui, c'est une nouvelle vie qui commence», a dit M. Sow, qui travaille dans une épicerie de Brossard. «Il y a de la joie dans notre maison maintenant», a ajouté Sayon Camara, qui se dit extrêmement reconnaissante envers les autorités provinciales et fédérales.

Le couple rêve de s'acheter une maison. Qui sait, la vie leur donnera peut-être un deuxième enfant...