La vague d'incendies criminels s'est poursuivie la nuit dernière, avec deux commerces visés à Montréal. Ces attaques portent à cinq le nombre d'endroits ciblés par des incendiaires en un peu plus de 24 heures.

Les policiers tentent de déterminer si des liens existent entre ces récents événements et la vague d'incendies au cocktail Molotov dirigée contre 18 établissements de la communauté italienne au cours des derniers mois.La nuit dernière, c'était au tour d'un magasin de tapis et d'une entreprise de peinture de faire les frais d'incendiaires.

Le magasin de tapis Téhéran du boulevard L'Acadie a d'abord été complètement ravagé par les flammes, près de la rue Louvain, dans l'arrondissement Ahuntsic.

Quelques restes de tapis calcinés, seuls vestiges du brasier, jonchaient le stationnement de la boutique, située dans un petit centre commercial.

Un bidon d'essence était abandonné sur le trottoir devant l'établissement, entre une pâtisserie et un salon de beauté.

L'eau et la fumée ont endommagé plusieurs commerces voisins.

Un couple âgé dans la soixantaine d'années possède depuis environ 15 ans le magasin incendié.

Quelques membres de leur famille constataient les dégâts ce matin. «Ça fait longtemps qu'ils sont là, ils s'entendent bien avec tout le monde et n'ont jamais reçu aucune menace. C'est sûr que c'est une erreur!», lance la nièce des propriétaires. «On a été victime d'un vol récemment», ajoute, désemparée, la fille des commerçants.

Le commerce de ses parents n'était apparemment pas assuré et ces derniers auraient tout perdu.

Incrédules, les employés des commerces voisins s'expliquaient mal l'attaque chez les marchands de tapis. «C'est un homme assez âgé avec sa femme, des gens sympathiques et tranquilles. On est surpris ce matin», résume l'employée d'un bureau. «Il y a beaucoup d'action dans le secteur. Un des bureaux a été défoncé par des cambrioleurs récemment», souligne Samir Katcho, à l'emploi d'une entreprise d'aliments pour animaux.

Selon nos sources, le feu aurait été allumé d'une manière semblable aux incendies qui visaient les cafés italiens. Mais le lien entre un marchand de tapis et des cafés italiens plonge les policiers dans le brouillard.

L'autre incendie criminel survenu la nuit dernière visait une compagnie de peinture de la rue Edison, dans l'arrondissement Anjou.

Les dommages sont minimes et pratiquement invisibles de l'extérieur. Selon la police, l'incident ne serait à première vue pas relié aux autres et quelqu'un pourrait avoir voulu profiter de la vague d'incendies en cours pour frapper.

Dans la nuit de mardi, un café et deux restaurants se sont retrouvés dans le collimateur des incendiaires. Quelqu'un a d'abord fracassé la vitrine du Café Vegas, rue Jean-Talon, avant d'y balancer un cocktail Molotov.

Le même manège a été répété dans des restaurants du quartier Côte-des-Neiges.

Le Café Vegas avait déjà été visé par un cocktail Molotov en novembre dernier.

Entre le 22 septembre et le 24 janvier, 18 établissements de la communauté italienne ont été visés par des cocktails Molotov dans le nord de la métropole.

L'enquête sur cette vague d'attaques a fait un bond de géant en mai, avec l'arrestation de neuf individus liés aux gangs de rue par l'équipe multidisciplinaire mise en place à la division du crime organisé du Service de police de la Ville de Montréal.

Depuis la période des Fêtes, 16 enquêteurs étaient affectés à temps plein à ce dossier. Dix d'entre eux relèvent de la section des incendies criminels, les autres de la division du crime organisé

Avant ces neuf arrestations, les attaques au cocktail Molotov connaissaient déjà une accalmie, qui s'explique peut-être par le fait que cinq des prévenus épinglés dans cette frappe se trouvaient déjà derrière les barreaux.

Avant ce coup de filet, seul Mickendy Démosthène, 18 ans, avait été arrêté relativement à l'un des attentats. Le jeune homme, lié aux gangs de rue, s'était lui-même livré après la publication de sa photo dans les médias

Encore à ce jour, la police n'a toujours pas divulgué les mobiles de ces attaques et retient plusieurs hypothèses. Selon nos sources, la plus plausible évoque des tensions entre des clans italiens. Ces tensions ne risquent pas de se résorber avec l'assassinat, au mois de décembre, de Nick Rizzuto, fils du présumé chef de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto. L'assassinat de Rizzuto et les attaques contre les cafés illustreraient l'instabilité qui règne dans la mafia montréalaise. Les incendies dans les cafés pourraient être le fait de gangs de rue à la solde d'un clan italien.

Le travail des policiers est grandement compliqué par l'omerta qui règne chez les commerçants visés par les cocktails Molotov.