Un homme d'origine ukrainienne aurait empoché des milliers de dollars en se servant de compatriotes pour flouer les services de l'immigration et obtenir de l'aide sociale, à Montréal.

Yafim Goikhberg, résidant de LaSalle âgé de 45 ans qui se décrit comme traducteur, aurait fabriqué de fausses identités et inventé des histoires de vie aux immigrés qu'il prenait en charge. Selon la théorie du ministère public, il leur réclamait de l'argent pour ses «services» et empochait ensuite leur chèque d'aide sociale. Il aurait ainsi fait neuf victimes. Arrêté en mars dernier, Goikhberg attend derrière les barreaux d'être jugé sous 24 accusations de fraude, vol, emploi de documents contrefaits et extorsion.

 

La juge Louise Villemure a refusé de le libérer sous cautionnement, notamment parce qu'il achevait de purger une peine de six mois de prison pour des crimes semblables. Il avait notamment conseillé à une immigrante russe de divorcer afin de pouvoir contracter des mariages blancs et de permettre à d'autres immigrants de demeurer au Canada.

Tout faux

Les faits reprochés à Goikhberg dans cette nouvelle affaire se seraient déroulés entre 2006 et 2009 et concernent des gens de l'ex-URSS qui venaient au Canada pour s'y établir. Dans leur pays d'origine, ces gens étaient déjà en contact avec Goikhberg. Il les accueillait à l'aéroport Montréal-Trudeau, les logeait, la plupart du temps chez lui, puis les conduisait aux bureaux d'Immigration Canada, où il les inscrivait comme demandeurs du statut de réfugié politique sous de faux noms, avec de fausses dates de naissance et de faux lieux d'origine. Il leur disait quoi dire et ne pas dire.

Une fois que l'agent d'Immigration Canada leur avait remis les documents officiels avec photos, Goikhberg conduisait ses «protégés» aux bureaux de l'aide sociale, où ils étaient inscrits sous leur fausse identité. Goikhberg les emmenait ensuite à une banque où il avait ouvert un compte et il encaissait leur chèque d'aide sociale. Selon le procureur de la Couronne Alexandre Arel, les immigrants étaient de bonne foi. Ils ne comprenaient pas vraiment ce qui se passait en raison de leur méconnaissance de l'anglais ou du français. Goikhberg ne leur disait pas que le gouvernement leur donnait un chèque pour les aider.

Un couple qui a fait affaire avec Goikhberg est parti pour Israël plutôt que de rester ici. Or, le ministère de la Solidarité sociale avait versé plus de 10 000$ dans leur compte, somme qui aurait abouti entre les mains de l'accusé.

Lors de perquisitions chez l'accusé, on a trouvé différents faux documents de même qu'un tampon destiné à authentifier de faux certificats de naissance et un autre de commissaire à l'assermentation.

Lors de l'enquête sous cautionnement, le procureur de la Couronne a fait valoir que la somme totale de la fraude n'était pas encore comptabilisée. Signalons enfin que l'Agence des services frontaliers enquête sur le cas de Goikhberg, information que le porte-parole, Dominique McNeely, a cependant refusé de confirmer hier. Il a aussi été impossible de connaître le statut de Goikhberg au Canada. Il sera de retour devant le tribunal le 16 juin pour l'enquête préliminaire.