Par son obstination à se voir comme deux entités distinctes, Leland Kaluza a été déclaré inapte à être jugé, la semaine dernière, en Cour du Québec. Reste maintenant à déterminer si Kaluza, qui insiste pour se faire appeler Yoseph Yisrael, son véritable «moi» selon lui, sera traité et médicamenté contre son gré.

Le psychiatre Jacques Talbot, qui a évalué Kaluza à la demande de la Cour, a conclu que l'homme de 26 ans a un mode de pensée psychotique associé à un délire religieux, ce qui le rend inapte à être jugé au cours d'un procès. La décision finale revenait cependant au juge Martin Vauclair. Ayant lui-même constaté l'attitude de l'accusé au cours du processus judiciaire, le magistrat s'est rendu aux arguments du Dr Talbot, la semaine dernière. Kaluza était fort déçu de cette conclusion, lui qui se trouve parfaitement sain d'esprit et qui brûle d'avoir un procès. «Tout le monde ici sait que je suis apte. Cessons de perdre du temps et de dépenser de l'argent pour rien», a fait valoir Kaluza la semaine dernière. Il était accompagné d'une poignée d'amis, membres comme lui d'un collectif d'artistes, notamment Monk.e, artiste peinte et rappeur.

 

Quoi qu'il en soit, le Dr Talbot pense qu'avec une médication appropriée, par voie orale ou intraveineuse, Kaluza pourrait devenir apte à être jugé en six semaines environ. Évidemment, Kaluza ne veut pas de ce traitement. L'audience à ce sujet aura lieu le 15 juin devant le juge Vauclair.

Naturel et artificiel

Kaluza, qui porte aussi le nom de Urbn Logix quand il fait dans le hip-hop, est accusé de possession d'arme et de possession de mari afin d'en faire le trafic, pour un incident qui remonte à l'été 2007. L'automne dernier, il s'est présenté à l'ouverture de son procès sous l'identité de Yoseph Yisrael. Il a affirmé que Kaluza ne pouvait être là parce qu'il n'avait pas de corps. Le juge Gilles Garneau l'a envoyé en évaluation psychiatrique. Depuis, contre vents et marées, Kaluza maintient le cap avec ses idées farfelues.

Bien orienté dans le temps et dans l'espace, Kaluza comprend ce qui se passe en cour. Calme et alerte, il participe activement aux débats et communique aisément avec l'avocat qui l'assiste, Gaétan Bourassa. Mais là où le bât blesse, c'est qu'il considère que Leland Kaluza (nom qui lui a été attribué à sa naissance) est une personne artificielle créée par le gouvernement. Le nom de Yoseph Yisrael, qu'il a lui-même choisi, serait ainsi son être naturel, donc sa véritable identité. En suivant cette logique, la Cour n'aurait pas juridiction sur Yoseph Yisrael.

«La Cour fait face à un individu chez qui on a diagnostiqué une pathologie psychotique, qui pense qu'il n'est pas lui mais quelqu'un d'autre», a noté le juge Vauclair, dans sa décision.