Pas moins de 82 nouveaux chefs d'accusation ont été déposés jeudi contre le colonel Russell Williams, l'ancien commandant de la base des Forces armées canadiennes de Trenton, en Ontario, contre qui pèsent déjà deux accusations de meurtre prémédité et deux d'agression sexuelle.

Ces ajouts au dossier du colonel Williams ont été annoncés à peine quelques heures avant sa comparution, par vidéoconférence, à propos des accusations de meurtre et d'agression sexuelle déjà portées contre lui. Il aurait assassiné Jessica Loyd, 27 ans, et la caporale Marie-France Comeau, 37 ans, et aurait agressé sexuellement deux autres femmes.

Sa comparution a permis de fixer la date de son retour devant la Cour au 24 juin.

Parmi les nouvelles accusations à être traitées, 46 auraient été perpétrées dans la région de Tweed en Ontario, 34 dans le secteur de Fallingbrook, près d'Ottawa, et deux à Belleville. Il s'agit, dans la majorité des cas, d'accusations d'entrée par effraction et de vol.

Le colonel Williams et son épouse possèdent des résidences à Ottawa et à Tweed, un village situé à 50 km de la base militaire de Trenton.

Communauté ébranlée

L'annonce de ces nouvelles accusations a une nouvelle fois ébranlé la communauté, à peine remise du choc initial qu'a provoqué l'arrestation du colonel à la suite des accusations de meurtre.

Une amie de Jessica Loyd, Terra Dafoe, s'attendait à ce qu'il y ait de nouvelles accusations mais pas autant. «Je ne peux m'empêcher de penser que cela représente un échec du système de justice», a commenté Mme Dafoe.

Le dévoilement constant de nouvelles informations, révélées au compte-gouttes, rend le deuil encore plus difficile pour l'entourage de la victime, a expliqué Mme Dafoe.

Bonnie Jones, la voisine du colonel Williams à Tweed, ne sait pas, quant à elle, quoi penser des nouveaux développements dans cette histoire. «La poussière recommençait à tomber et tout est à nouveau ressassé», a-t-elle exprimé.

Le maire de Quinte Ouest, John Williams, croit que la population pourrait être étonnée par le nombre d'accusations, d'autant plus que certaines victimes de cambriolages n'ont même pas réalisé qu'une personne était entrée par effraction dans leur domicile.

«Mais ils seraient heureux d'apprendre que ces incidents ont, je l'espère, cessé», a dit le maire, qui n'a pas de lien avec le colonel.

«Je ne sais pas comment quelqu'un aurait eu le temps de faire tout cela, en plus de son travail. On se demande alors quand ces incidents se sont produits», a ajouté M. Williams.

Tentative de suicide?



Selon plusieurs sources, il y a près d'un mois, le colonel Williams a tenté de s'enlever la vie dans sa cellule du centre de détention à Napanee. Il aurait essayé de s'étouffer en s'enfonçant dans la gorge un rouleau de papier de toilette rempli de carton et de papier d'aluminium, après avoir bloqué la serrure de sa cellule.

Les gardiens auraient cependant réussi à s'interposer. Depuis, il fait l'objet d'une surveillance constante pour éviter qu'il tente de nouveau de se suicider.

Russell Williams, qui portait une combinaison de détenu orange, semblait physiquement bien portant, jeudi, malgré les informations voulant qu'il ait cessé de s'alimenter à la suite de sa tentative de suicide ratée. Il a simplement énoncé son nom, lorsqu'on lui a demandé de s'identifier et a dit merci à la fin de la brève comparution.

Le colonel Williams, âgé de 47 ans, a été appréhendé et accusé en février des meurtres de Mmes Comeau et Lloyd.

La caporale Comeau a été trouvée sans vie dans sa résidence de Brighton, en novembre dernier. Elle était agente de bord à la base de Trenton et avait servi à bord de nombreux vols pilotés par le colonel Williams transportant notamment la gouverneure générale, le premier ministre et autres dignitaires dans les années 1990.

Le corps de Mme Lloyd, lui, fut découvert à Tweed deux semaines après qu'elle eut cessé de se présenter au travail à Napanee.

Nouvelles accusations: des crimes non résolus

Les nouvelles accusations émaneraient d'une révision au peigne fin de crimes non résolus dans l'est de l'Ontario.

Les policiers sont toutefois avares de détails et refusent de dire si d'autres accusations pourraient être déposées contre le militaire.

Les accusations d'agression sexuelle s'accompagnent de deux accusations de séquestration et d'introduction par effraction liées à des attaques contre deux femmes de Tweed, les 17 et 30 septembre de l'année dernière.

A l'extérieur de la cour, le lieutenant-colonel Tony O'Keefe, qui fait le lien entre Williams et l'armée, a affirmé qu'il était difficile de commenter l'état mental de l'accusé. «Il me semblait correct -honnêtement, je ne peux pas dire. Il ne parle pas de l'affaire avec moi», a expliqué M. O'Keefe.

L'ex-commandant de la base de Trenton est devenu suspect lorsque les policiers, lors d'une vérification routière, ont constaté que les pneus de son véhicule utilitaire sport, d'une facture plutôt rare, correspondaient aux traces découvertes sur une des scènes de crime.