Même si Johanne Bariteau criait «à l'aide» en pleine nuit dans son appartement, ses voisins n'ont pas cru bon d'appeler la police. La raison: à Verdun, «ça crie tout le temps».

C'est ce qu'a expliqué Yannick Allard ce matin au procès de la femme de 41 ans accusée du meurtre non-prémédité de son livreur de cocaïne, Nicola Terranova. M. Allard et sa conjointe, Joyce Ellis, habitaient le logement situé sous celui de l'accusée dans un immeuble de la 1ère avenue à Verdun.

Le 28 décembre 2007, le corps de Nicola Terranova, 36 ans, a été retrouvé sans vie dans le bain du logement de l'accusée. La victime a reçu «au moins» 19 coups à la tête assénés à l'aide d'un marteau et/ou d'une bouteille.

Cette nuit-là, vers 4h du matin, Joyce Ellis a entendu des bruits provenant du logement de l'accusée, comme si cette dernière donnait des coups de pied sur le plancher.

Les deux femmes avaient une entente: si l'une frappait avec un balai au plafond ou si l'autre donnait des coups de pied au plancher, cela voulait dire qu'elle avait un problème. L'accusée - qui vivait seule - s'est ensuite mise à crier: «à l'aide».

Mme Ellis a donc réveillé son mari, puis tous deux sont allés cognés à la porte de leur voisine. Personne n'a répondu. Plutôt que d'appeler le 911, le couple est retourné se coucher.

«C'est triste à dire, mais je n'en ai pas fait de cas. Dans mon quartier, ça crie tout le temps», a dit le voisin aux jurés ce matin, interrogé par la Couronne. Sa conjointe, aussi appelée à la barre en matinée, leur a servi une réponse semblable. «Si vous viviez dans mon immeuble, vous comprendriez. Il y a toujours des bagarres», a-t-elle indiqué.

L'accusée avait emménagé dans l'immeuble de la 1ère avenue quelques mois avant le meurtre. Mme Ellis et elle se sont liées d'amitié. Mais cette nuit-là, Mme Ellis, mère de trois enfants, était «en criss» d'avoir été réveillée. Elle ne s'est donc pas inquiétée outre mesure des raisons pour lesquelles sa voisine aurait pu crier «à l'aide», puis ne pas répondre à la porte.

Le matin du 28 décembre, l'accusée a finalement donné signe de vie à ses voisins. Elle les a appelés pour s'excuser du vacarme, expliquant que ses deux chats avaient fait tomber des bouteilles d'alcool installées sur une table de la salle à manger. L'accusée voulait également leur emprunter de l'eau de Javel. Elle n'est toutefois pas descendue en chercher.

La victime avait pris de la coke

Avant d'aller livrer de la cocaïne, Nicola Terranova en avait lui-même consommé avec sa conjointe, Caroline Carty, a témoigné cette dernière en après-midi. Il devait livrer de la drogue à plusieurs clients cette nuit-là. Il a quitté leur logement vers 4h. Trente minutes plus tard, elle l'a rejoint sur son cellulaire pour lui souhaiter «bonne fête». Il semblait de bonne humeur, a-t-elle indiqué.

Peu avant 5h, le répartiteur du livreur, celui qui recevait les commandes des clients -un certain Tony - a appelé Mme Carty, car il était sans nouvelle de Terranova. Cette dernière a tenté de rejoindre son conjoint à nouveau, sans succès. Elle craignait qu'il se soit fait arrêter.

Le corps de la victime sera retrouvé vers 15h35 cette journée-là.

La preuve de la Couronne, représentée par Me Hélène Di Salvo, se poursuit mardi. Le procès devant jury doit durer trois semaines.