Le fils de la photojournaliste montréalaise Zahra Kazemi pourra-t-il demander réparation devant les tribunaux québécois pour la mort de sa mère, tuée dans une prison iranienne en 2003? C'est la question à laquelle un juge de la Cour supérieure du Québec doit maintenant répondre.

«C'est un débat complexe qui ne se terminera pas à ce niveau, mais il doit se faire», a dit hier le juge Robert Mongeon, avant de se retirer pour mettre la question en délibéré.

 

Entre la fin du mois de novembre et hier, les avocats de Stephan Hachemi, fils de Mme Kazemi, et ceux de la République islamique d'Iran ont eu cinq jours pour faire valoir leur point de vue.

Estimant qu'il devrait pouvoir poursuivre l'Iran et certains de ses représentants au Canada pour la torture dont a souffert sa mère et les torts psychologiques qu'il a lui-même subis, Stephan Hachemi, qui réclame 17 millions de dollars en dommages, était épaulé dans sa plaidoirie par Amnistie internationale et le Centre canadien pour la justice internationale. Une trentaine de partisans, dont plusieurs avaient enfilé des t-shirts à l'effigie de Zahra Kazemi, étaient aussi présents au palais de justice de Montréal hier matin pour lui témoigner leur soutien.

Représenté en cour par deux avocats canadiens, l'Iran avait pour sa part un allié juridique peu commun: le gouvernement du Canada. Même si les relations diplomatiques entre les deux pays sont glaciales depuis la mort de Mme Kazemi, le gouvernement de Stephen Harper a dépêché un avocat pour plaider, à l'instar de l'Iran, que la loi sur l'immunité des États protège la République islamique, son chef d'État et ses agents contre les poursuites au civil en sol canadien.

Cette intervention du gouvernement canadien en faveur de l'Iran irrite au plus haut point Stephan Hachemi. «Si ce n'est pas la responsabilité du Canada de défendre une photojournaliste de nationalité canadienne, exemplaire, qui s'est fait torturer en Iran, c'est quoi? Nous faire payer des taxes pour bombarder des enfants afghans?» a ironisé le jeune homme de 32 ans, hier. Ce dernier a d'ailleurs envoyé une lettre au premier ministre du pays, lui demandant de revoir sa position. «Je n'ai pas trop d'espoirs à ce chapitre, a-t-il souligné. J'ai cependant espoir que le juge trouvera une voie pour que des gens comme ma mère et moi puissions obtenir justice.»

Les avocats de l'Iran et du gouvernement canadien ont refusé de répondre aux questions des médias.