L'adolescent responsable de la mort de Kim Ngu Lieu, cette femme de 67 ans agressée à Montréal-Nord, passera les 33 prochains mois dans un centre jeunesse pour tenter de retrouver le droit chemin.

«Il y a encore beaucoup à faire pour réhabiliter ce jeune garçon», a indiqué le juge Louis Grégoire au moment du prononcé de la peine, mercredi, en chambre de la jeunesse de Montréal. Assis dans le box des accusés, cet adolescent à l'air frêle semblait flotter dans son grand t-shirt blanc.

Le juge Grégoire a pris en compte son «jeune âge» (15 ans au moment des faits), son «problème de consommation de drogue», son «oisiveté», son «désoeuvrement» ainsi que son «manque d'encadrement et de jugement moral» pour lui imposer cette peine.

L'adolescent avait plaidé coupable en septembre dernier à une accusation réduite d'homicide involontaire ainsi qu'à des accusations de vol qualifié, de complot pour vol et de possession simple de marijuana. Il a ainsi écopé d'un peu moins que la peine maximale de trois ans prévue pour ce genre de crimes par la loi sur le système de justice pénale pour adolescents.

La procureure de la Couronne, Me Karen Ohayon, a d'abord voulu recommander au juge une peine pour adultes, mais elle s'est ravisée devant les progrès qu'a faits l'adolescent au centre jeunesse depuis son arrestation. Tant la Couronne que la défense, représentée par Me François Taddeo, se sont dits satisfaits de la peine.

Fils de la victime «résigné»

L'un des fils de la victime, Quoc Huy Truong, est plutôt «résigné». «Je ne me sens pas prêt à lui pardonner. Ma mère était quelqu'un qui aimait vivre, qui avait des projets. J'attends de voir si le jeune deviendra une bonne personne ou non dans trois ans», a dit aux médias l'homme de 34 ans à sa sortie de la cour.

M. Truong dit «comprendre» que le système de justice pour adolescents est basé sur la réhabilitation. Or, il estime que les lois devraient être plus sévères. Il entend militer dans les prochaines années pour qu'elles le deviennent. Le juge Grégoire lui a d'ailleurs assuré qu'il avait bien entendu ses propos, ceux d'un homme blessé et attristé par la perte de sa mère, mais également ceux d'un homme «sage et raisonné» concernant la suite des choses.

Deux autres jeunes de 16 ans sont accusés dans cette affaire, mais l'instigateur du drame est l'adolescent de 15 ans. Il cherchait de l'argent pour rembourser des dettes de drogue. Après avoir bu de l'alcool toute la soirée, il a convaincu les deux autres de commettre un vol. C'est lui qui a choisi la victime - Mme Lieu mesurait 4 pieds 11 pouces et pesait 115 livres - alors qu'elle attendait l'autobus, seule dans Montréal-Nord. Et c'est également lui qui l'a poussée lorsqu'elle a refusé de donner son sac à main.

Lorsque l'adolescent de 15 ans a fui les lieux du crime avec ses deux complices, il ne se doutait même pas que la victime avait pu être blessée, a-t-il confié à une intervenante du centre jeunesse après son arrestation. Mme Lieu s'est heurté la tête en tombant sur le trottoir et est morte deux jours plus tard à l'hôpital.

Le juge Grégoire a estimé que les regrets de l'adolescent étaient sincères. Le jeune «n'a pas perdu son temps» depuis son arrestation il y a six mois puisqu'il poursuit ses études avec succès. Le magistrat lui «crédite» donc trois mois passés en détention préventive sur une peine de trois ans, ce qui donne 33 mois en «milieu de garde fermé». Il ne pourra donc pas sortir du centre jeunesse avant la fin de sa peine.

Les deux autres jeunes - qui ont plaidé non coupable - reviennent en cour le 21 décembre.