Huit attentats, sept cafés italiens, aucun suspect. Des malfaiteurs ont encore frappé à coups de cocktails Molotov, lundi matin. Ils ont ciblé deux commerces en moins de 40 minutes. Guerre entre gangs de rue et mafia italienne? La police n'écarte aucune piste. Dans le quartier Saint-Michel, on affirme que les cafés incendiés ont un point en commun: le trafic de drogue.

Et de huit. La vague d'attentats au cocktail Molotov contre des cafés italiens de Montréal s'est poursuivie lundi, avec deux attaques en moins de 40 minutes. Coup sur coup, les cafés Nouba, dans le quartier Mile End, et Vegas, dans Saint-Michel, ont reçu la visite d'incendiaires qui y ont lancé un objet enflammé.Dans les deux cas, les flammes ont été rapidement maîtrisées et les dommages ont été mineurs. Il s'agit des septième et huitième attaques du genre depuis un mois. Aucune arrestation n'a encore été faite.

Le journaliste Hugo Meunier résume les attentats précédents:

Du côté de la police, on n'élimine aucune piste, même si on hésite à parler de «guerre». «S'agit-il d'un conflit entre Italiens? De gangs de rue contre les Italiens? Toutes les pistes sont vérifiées, a expliqué le commandant Robert Quévillon, de la direction des crimes économiques et de la propriété. Des liens, on en fait: on parle de cafés italiens, de cocktails Molotov. Par contre, les mobiles nous sont inconnus. Et comme on n'a pas le mobile, je ne peux employer le mot guerre.»

Les propriétaires des commerces touchés, a précisé le policier, ne sont pas très volubiles... «On n'a pas beaucoup de pistes ou d'informations sur les suspects.»

Hier matin, boulevard Saint-Laurent, les policiers s'affairaient à récolter les maigres indices laissés par les incendiaires. Le cocktail Molotov, après avoir brisé la vitrine du café Nouba, au 5329, boulevard Saint-Laurent, a enflammé une chaise, qui a été promptement sortie de l'établissement. Cette chaise et les éclats de vitre étaient les seules indications de l'attentat, survenu à 6h18.

Il s'agissait de la deuxième attaque du genre contre le Nouba. La dernière fois, le 15 novembre, les incendiaires s'en étaient également pris à un logement appartenant au propriétaire du commerce, qui affirme soupçonner des créanciers de son ancien associé (voir autre texte).À 7h, le café Vegas, au 2670, rue Jean-Talon, a subi le même sort. Situé dans un coin discret, dans un immeuble brun à l'angle de la 6e Avenue, ce café était «sans histoire», a soutenu le propriétaire des lieux, qui a refusé de s'identifier.

«Je n'ai reçu aucun avertissement, et avant ce matin, il n'était jamais rien arrivé, a déclaré le propriétaire. Je n'ai aucune idée de qui a fait ça. C'est un simple café, où les gens viennent jouer aux machines et boire.»

La police de Montréal a mis sur pied des patrouilles «de prévention» visant à protéger les commerces qui pourraient être la cible d'attentats. «On travaille fort, on prend cette affaire au sérieux; nous voulons éviter qu'un citoyen innocent soit victime d'un de ces attentats», a précisé le commandant Quévillon.

La vague d'attaques au cocktail Molotov contre des cafés italiens a commencé le 28 octobre dernier, alors que le café Pirandello et le Bistro Peaches ont été les premières cibles. La façon de procéder est toujours la même, six attaques plus tard. Un cocktail Molotov est lancé dans le commerce au travers de la vitrine au petit matin; il s'éteint presque aussitôt et cause des dommages mineurs. Personne n'a été blessé à la suite de ces événements.

Les cafés visés sont de petits établissements avec, le plus souvent, des logements aux étages supérieurs. Tous les employés et propriétaires interrogés par les médias ont fait part de leur surprise et assuré qu'ils n'avaient aucune idée de l'identité des incendiaires. Certains, sous le couvert de l'anonymat, ont évoqué l'hypothèse de représailles de la pègre envers des commerçants qui ont refusé l'accès à leur établissement. D'autres y voient une tentative de gangs de rue de combler le vide créé par les opérations policières des dernières années dans les rangs du crime organisé, notamment les motards et la mafia italienne.

 

LES ATTENTATS

23 NOVEMBRE

LE NOUBA

(5329, boul. Saint-Laurent)  

CAFÉ VEGAS

(2670, rue Jean-Talon)

19 NOVEMBRE

CAFÉ CRYSTELE

(Angle Villeray et 17e avenue)

15 NOVEMBRE

LE NOUBA

(5329, boul. Saint-Laurent)

5 NOVEMBRE

CAFÉ AVIANO

(Angle Saint-Michel et Legendre)

29 OCTOBRE

CAFÉ BISTRO CHARLAND

(Rue Charland)

28 OCTOBRE

CAFÉ PIRANDELLO

(Rue Robert)

BARPEACHES

(Boul. Saint-Michel)

 

Photo: jprancourt @dn5, collaboration spéciale

Un cocktail Molotov a été lancé dans un établissement du boulevard Saint-Laurent, ce matin.