«Une personne qui se fait exploser ne sera jamais traduite devant les tribunaux. Saïd Namouh est devant le tribunal parce qu'on l'a arrêté avant», a fait valoir le procureur de la Couronne Dominique Dudemaine, hier, en réclamant la prison à perpétuité pour celui qui a été surnommé le terroriste de Maskinongé.

Namouh, 36 ans, a été reconnu coupable, le 1er octobre dernier, de quatre accusations relatives au terrorisme. Il est le premier individu condamné au Québec en vertu de la législation antiterrorisme adoptée en décembre 2001. De novembre 2006 jusqu'à son arrestation, en septembre 2007, il s'est employé à promouvoir le terrorisme par le truchement de l'internet, pour le compte du Global Islamic Media Front. Ce groupe, dont il était un membre actif et engagé, fait la promotion du jihad par la violence. C'est un groupe terroriste, a conclu le juge Claude Leblond.

Au moment de son arrestation, selon la preuve, Namouh s'apprêtait à quitter le Canada à destination du Maghreb et de l'Égypte dans le but de rencontrer des coconspirateurs afin de commettre un attentat à l'explosif. Namouh rêvait de mourir en martyr: «Mon bien-aimé frère, mon rêve est de mourir en martyr pour la cause d'Allah à vos côtés», avait-il notamment écrit.

Non violent

Appelé à la barre pour la première fois depuis son arrestation, Namouh a rendu un témoignage un peu échevelé. Il s'est employé à se présenter comme non violent, voire comme un homme bon et généreux. Né au Maroc, deuxième d'une famille de sept enfants, il a une formation de machiniste. Son père était commerçant. Il a au Maroc un fils de 10 ans, issu d'une relation avec une femme de ce pays. Par la suite, il a rencontré une Québécoise qui était en vacances au Maroc. Il s'est marié avec cette femme beaucoup plus âgée que lui, et est venu s'établir au Québec, dans la région de Trois-Rivières. Musulman, il s'est trouvé un emploi dans une usine de transformation de porc à Yamachiche. Il y a travaillé pendant un an. Ensuite il a trouvé un meilleur emploi dans une scierie. Son mariage n'a pas duré. Il a fréquenté une autre femme, dans la région de Trois-Rivières, mais cette relation a mal fini. Il a été arrêté après s'être introduit chez cette femme et avoir donné un coup de poing dans le mur. Il assure que chez lui, au Maroc, il s'occupait des handicapés, et achetait des vêtements pour les enfants pauvres.

Namouh affirme avoir fait l'objet de pressions de la part de la GRC et du SCRS depuis son incarcération. On lui a envoyé un délateur pour essayer de l'incriminer. On a tenté de faire croire qu'il avait fabriqué une bombe en prison. Tout cela est faux, dit-il. D'ailleurs, il n'a jamais été accusé de rien. Par ailleurs, il soutient que les autorités l'ont envoyé avec un chandail rouge dans une aile de la prison réservée aux «Bleus».

Son avocat, René Duval, estime que la peine réclamée par la Couronne est «grossièrement exagérée», et vise à «impressionner la communauté internationale». Me Duval n'a pas proposé de durée à la peine, mais il a fait valoir que les 26 mois passés en détention préventive depuis l'arrestation de Namouh devraient compter en double. Ainsi, son client aurait déjà purgé une peine de quatre ans et quatre mois, ce qui est suffisant, a-t-il laissé entendre.

Le juge Leblond rendra sa décision le 17 février prochain.