Abdelkader Belaouni est libre. Jeudi dernier, le ressortissant algérien a reçu d'Ottawa la permission de rester au pays. Après presque quatre ans de réclusion dans une église de Montréal, il a dû accepter de vivre un mois en Tunisie pour obtenir ses papiers.

«Il ne faut jamais lâcher. Jamais lâcher», a-t-il répété ce matin sur le parvis de l'église, où il a longuement remercié ses amis et le père Jim MacDonald, qui lui offre l'hospitalité depuis le 1er janvier 2006.

Émus, les proches qui réclamaient depuis près de quatre ans un statut de résident pour M. Belaouni, ont applaudi leur ami après sa sortie de l'église orchestrée devant les médias.

«C'est un moment de grande émotion, a soufflé Nora Burke, une amie. Nous le connaissions avant qu'il entre dans cette église... et nous avons pleuré lorsque nous avons appris qu'il peut enfin sortir.»

Aveugle, Abdelkader Belaouni s'était réfugié il y a presque quatre ans dans l'église du quartier Pointe-Saint-Charles après avoir reçu un avis d'expulsion du pays. Le 23 septembre, il a dû se résigner à quitter le presbytère afin de se rendre en Tunisie. En contact avec son avocat, il a rempli là-bas les papiers nécessaires pour revenir au Canada, un mois plus tard.

«Ce seul mois a été plus stressant que les trois ans et demi que j'ai passés dans l'église, dit-il en remplissant le formulaire pour obtenir sa carte d'assurance-maladie. Mon avocat m'avait dit de ne pas m'en faire, mais je n'avais pas beaucoup confiance. J'étais stressé.»

Jacqueline Roby, chargée des communications à Citoyenneté et Immigration Canada explique que «quand un individu se conforme aux modalités de renvoi, il a des avenues qui peuvent lui permettre de revenir au pays». Elle a toutefois refusé de commenter le cas de M. Belaouni.

Dans les prochains jours le nouveau résident canadien vivra chez des amis. Ensuite, il compte louer un appartement, lancer un disque et travailler dans un centre pour immigrants. Maintenant qu'il le peut, il subira aussi un examen médical.

«Je veux avoir une vie normale», a-t-il expliqué, avant d'ajouter qu'il se sent «fatigué».

L'Algérien d'origine a vécu à New York entre 1996 et 2003. Après avoir vu ses demandes de «carte verte» refusées, il a quitté les États-Unis en 2003. Une fois au Canada, il a tenté d'obtenir un statut de résident permanent, sans succès jusqu'à jeudi dernier.

Vie modeste

C'est une connaissance commune qui a présenté Abdelkader Belaouni au père MacDonald. Le ressortissant algérien a vécu pendant trois ans et neuf mois dans une chambre modeste du presbytère, à quelques pas de celle du prêtre.

Au moment d'accueillir M. Belaouni dans son église, le père MacDonald ne s'est pas informé des pratiques religieuses du ressortissant algérien. Au fil des jours, il a appris qu'il était de confession musulmane.

Loin de s'en formaliser, le prêtre catholique dit plutôt avoir beaucoup de respect pour la pratique religieuse de M. Belaouni.

«Il prie mieux que moi. Beaucoup mieux que moi», a-t-il dit, avant d'ajouter que son invité fréquentait la messe à l'occasion pendant son séjour dans l'église, question de «fréquenter une communauté».