La Couronne demande une peine de prison ferme de 18 à 24 mois pour l'ex-directeur général du Parti libéral du Canada au Québec, Benoît Corbeil. L'homme a plaidé coupable à des accusations de trafic d'influence et de fraude.

M. Corbeil affirme qu'il a agi ainsi pour le parti, jamais pour lui-même. «Je n'ai rien retiré personnellement», a assuré M. Corbeil, hier, lors de son témoignage dans le cadre des plaidoiries sur la peine à lui imposer.

 

En 1997, alors qu'il était coordonnateur régional du Parti libéral, il avait soutiré 50 000$ à Réal Ouimet, propriétaire d'une carrière de Saint-Jean-sur-Richelieu, en échange d'une «oreille attentive à Ottawa» pour un terrain fédéral qu'il convoitait. M. Corbeil a aussi admis avoir fait six fausses factures totalisant 117 000$ au Parti libéral, en 1999 et 2000, alors qu'il était directeur général de ce parti.

«Le nerf de la guerre, c'est l'argent», a lancé M. Corbeil, hier, en expliquant qu'il avait agi ainsi parce que le parti avait besoin d'argent, et que c'est comme ça que ça fonctionnait. «On avait des problèmes de financement, on était régulièrement en difficulté, je devais remplir les salles pour les congrès», a-t-il ajouté en précisant qu'il fallait payer les autocars, les bénévoles... Selon M. Corbeil, le plan des fausses factures est venu de «Giuseppe Morselli, qui en menait large au parti». L'argent servait à «patcher les manques» dans les circonscriptions. De l'argent aurait aussi été donné à Alfonso Gagliano pour des «voyages en Floride avec une équipe». M. Corbeil admet que M. Morselli lui a remis 5000$ au tournant des années 2000. Mais c'était un présent, parce que M. Corbeil allait adopter un enfant en Chine. Il a aussi parlé de la querelle au sein du PLC entre le clan de Jean Chrétien et celui de Paul Martin.

M. Corbeil a raconté que la politique l'attirait depuis son enfance. Et il a aimé en faire. Mais maintenant, c'est «fini». L'homme, qui a fait des études de doctorat en sciences politiques, travaille aujourd'hui comme directeur des ventes dans une entreprise d'entretien ménager, et gagne entre 100 000$ et 150 000$ par année. «Je veux tourner la page. Je veux poursuivre ma vie correctement», a-t-il dit, en espérant éviter la prison. Son avocat, Michel Grenier, demande une absolution avec un don et des travaux communautaires, ou une amende.

Me Josée Fontaine, de la Couronne, estime que les circonstances sont aggravantes et elle demande un remboursement en plus de la prison. Pour elle, M. Corbeil a soutiré de l'argent à un «pauvre vieux monsieur», et il a appauvri son employeur, le Parti libéral. Me Charles Côté, qui représente le Parti libéral, a indiqué à la sortie de la salle d'audience, hier, que les explications de M. Corbeil ne tenaient pas la route, parce qu'à l'époque des fraudes, il n'y avait pas de limite pour les contributions aux partis politiques.

La juge rendra sa décision le 4 décembre prochain.