L'ancien chef de police de Deux-Montagnes, Normand Mastromatteo, jure dur comme fer avoir remis 13 500$ à l'informateur qui lui a donné le tuyau dans l'opération Balayage, mais les trois seules personnes capables de corroborer cette affirmation sont mortes ou disparues dans la brume, tout comme les rapports de police.

Se référant aux trois cahiers dans lesquels il dit avoir consigné tout ce qu'il a fait du premier jour de sa nomination, le 17 décembre 2001, à son départ forcé en novembre 2003, M. Mastromatteo est catégorique: il était en compagnie de son adjoint, feu Martin Demers, les deux fois qu'il a rencontré son indic afin de lui remettre l'argent reçu de la Ville, Quant à son «canari», il était avec un ami.

 

À ses dires, les échanges se sont déroulés dans une gare. Le premier paiement a été fait le 30 juin 2003 et le second, en avril 2004. Le maire et le directeur général trouvaient ça lourd. «C'était une grosse dépense et il fallait que ça passe par le conseil municipal», a-t-il dit pour expliquer le délai de plus de 18 mois qui s'est écoulé entre la saisie des 15 serres hydroponiques à Sainte-Marthe-sur-le-Lac et la remise de l'argent.

À son retour de ces deux rencontres secrètes avec son adjoint, il soutient avoir rédigé les «rapports de source» requis et les avoir déposés dans le coffre-fort du poste de police. Il ne les a plus jamais revus, si ce n'est qu'il a vu un autre de ses adjoints, Serge Frenette, «avec des enveloppes d'informateurs», au moment où celui-ci était dans la salle de conférence, à l'automne 2003.

«Étaient-ils là-dedans (en parlant de ses rapports)? Je ne le sais pas», a-t-il dit. Chose certaine, l'indic ne lui a pas donné de reçu. Comme ce dernier a été assassiné, c'est son ami qui est venu chercher les 2000$ constituant le deuxième paiement, en avril 2004. «J'aurais pu ne pas payer, mais j'ai quand même respecté l'entente, parce que la blonde de l'indic était dans la misère», a-t-il relaté. L'indic étant mort, il lui est aujourd'hui impossible de retrouver l'ami. «On a une description. Si j'avais été capable, soyez assuré que j'aurais tenté de le faire témoigner», a-t-il dit au juge Jean Sirois.

Au cours du contre-interrogatoire, Me Jacques Dagenais l'a par ailleurs confronté à la déclaration que son adjoint Martin Demers a faite devant le tribunal, avant sa mort. Lors de ce témoignage rendu en 2006, à l'enquête préliminaire, M. Demers a assuré qu'il n'avait jamais rencontré l'indic, encore moins qu'il l'avait payé en compagnie de M. Mastromatteo. «Il ment», a répondu l'ancien chef de police de Deux-Montagnes. Il met aussi en doute le témoignage d'une secrétaire qui lui impute le contenu d'une lettre envoyée à la Ville, et dont les noms de deux des signataires auraient été forgés.