Alors qu'il était secrétaire-trésorier du syndicat du Casino de Montréal, Santo Sicilia a détourné plus de 950 000$ pendant les huit ans où il a exercé son mandat. Ses gestes, commis entre 1995 et 2003, viennent de lui valoir 10 mois de prison ferme. Même si Sicilia, 37 ans, a remboursé 250 000$ au syndicat depuis la découverte de la supercherie et qu'il a plaidé coupable à une accusation de fraude dans cette affaire, le juge Robert Sansfaçon a trouvé que la faute commandait une peine de prison.

Le magistrat, qui rendait là son dernier jugement en carrière puisqu'il a pris sa retraite le lendemain, en a profité pour lancer une salve à l'intention des bureaux de direction de syndicats «qui se sont payé la traite pendant de très, très, très longues années pour des sommes extrêmement importantes», aux dépens des membres.

 

En ce qui concerne Sicilia, le juge a dit que l'argent lui avait servi «d'effet levier pour bien vivre». Il a ajouté que, pour arriver à ses fins, Sicilia avait menti pendant toutes ces années à ses collègues. Le syndicat concerné est celui de l'unité générale, qui regroupe environ 1000 membres sous 32 titres différents. Les croupiers et employés de restaurant n'en font pas partie.

À partir du compte du syndicat où étaient déposées les cotisations des membres, Sicilia émettait des chèques pour rembourser ses propres marges de crédit, payer des achats ou des entreprises qui n'avaient aucun lien avec le syndicat. Trois personnes étaient autorisées à signer des chèques: le président, Yves Veillette, le vice-président, François Favreau, et le trésorier Santo Sicilia. Il fallait deux signatures sur les chèques afin de les valider. Seul Sicilia a été accusé au criminel, mais tous trois ont été poursuivis au civil par leur syndicat. Sicilia a réglé à l'amiable en remboursant 250 000$, tandis que François Favreau a collaboré à l'enquête et a été blanchi.

Signature imitée

Selon l'actuel président du syndicat, David Santos, une étude graphologique a permis de démontrer que l'écriture de M. Favreau avait été imitée sur les chèques. La poursuite civile est cependant toujours en cours contre l'ex-président Yves Veillette. Celui-ci se défend aussi d'avoir participé à cette fraude. Des trois, seul M. Favreau travaille encore au Casino.

Il est à noter que le syndicat en question a été fondé en 1995. C'est donc dire que la fraude a commencé dès sa création. David Santos pense que l'inexpérience a justement joué en défaveur du syndicat dans cette affaire. «Tout le monde faisait ses classes», a-t-il dit à La Presse. Il s'est déclaré satisfait de la peine de 10 mois de «prison ferme» et du remboursement obtenu au civil. «On avait une preuve solide pour 700 000$ (de fraude), mais nos attentes (de remboursement) étaient presque nulles. On a eu 250 000$.»