L'enquête sur la mise en liberté provisoire des 13 prévenus soupçonnés d'avoir trafiqué de la drogue pour le compte des Hells Angels a démarré sur des chapeaux de roue, hier, en Cour du Québec, par le témoignage d'un des «architectes» de l'opération SharQc, Simon Godbout.

Avant que le policier de la Sûreté du Québec prenne la barre, les avocats de la défense ont contesté la manière dont est présentée l'imposante dénonciation déposée par la poursuite. Faute de convaincre le juge Serge Boisvert, ils en ont profité pour réitérer que leurs clients sont toujours présumés innocents, et surtout qu'ils ne sont accusés d'aucun des 22 meurtres que l'on reproche aux 111 membres des Hells Angels apparaissant à l'acte d'accusation.

Responsable de la collection des informations soutenant les diverses enquêtes menées par les sept unités de lutte contre les motards partout au Québec, le policier Simon Godbout - qui a aussi rédigé la déclaration de 1500 pages appuyant les requêtes judiciaires de la police - a passé la journée d'hier à expliquer comment s'est articulée l'opération SharQc, mise en branle il y a deux ans.

À l'aide d'organigrammes, de documents saisis, de vidéos et de confidences de délateurs, le policier a décrit la structure d'organisation et le fonctionnement des Hells Angels depuis les 20 dernières années, c'est-à-dire «avant, pendant et après» la guerre contre les Rock Machine et leurs associés, qui a fait plus de 160 victimes, entre 1994 et 2002.

En gros, même si on ne peut en dévoiler les détails en raison d'une ordonnance de non-publication demandée par la défense, le policier a rapporté sensiblement ce qui s'est dit lors des quatre grands procès des Hells Angels qui se sont tenus à la suite de l'opération Printemps 2001. Sa déposition était bien sûr enrichie d'éléments contemporains reliés à l'opération SharQc.

Des 13 accusés qui aimeraient reprendre leur liberté, on trouve l'ancien chef des Rock Machine Salvatore Cazzetta, 53 ans, passé «officiellement» chez les Hells Angels après sa sortie de prison en 2004, ainsi que Mélanie Gauthier, 32 ans, amie de coeur d'un motard du Saguenay. Elle est la seule femme mise en accusation aux côtés des 156 membres de la puissante bande de motards et de leurs associés arrêtés lors de la rafle panquébécoise du 15 avril dernier.

Au moment où l'enquête sur la mise en liberté allait commencer, Bruno Belzile, 33 ans, de l'Ange-Gardien, a annoncé qu'il se désistait de sa requête jusqu'à nouvel ordre. En accord avec la poursuite, le juge Boisvert a permis au Hells Angels Richard Hudon, 48 ans, un des fondateurs du chapitre de Québec, de se joindre aux 12 autres requérants. L'audience se poursuit aujourd'hui avec le contre-interrogatoire du policier Simon Godbout. Huit autres enquêteurs devraient être entendus au cours des deux prochaines semaines.

Des 156 personnes mentionnées dans l'acte d'accusation, 131 demeurent sous contrôle judiciaire, 25 sont toujours recherchées, dont Normand Marvin «Casper» Ouimet, du chapitre de Trois-Rivières, alors que cinq autres ont déjà obtenu une libération provisoire en attendant leur procès.