Malgré un ordre de la Cour émis le 12 mars dernier, Microsoft et la Régie des rentes du Québec tardent à dévoiler les détails d'un contrat de 700 000$ attribué sans appel d'offres à la multinationale du logiciel.

Savoir-faire Linux, une petite entreprise montréalaise spécialisée dans l'implantation de logiciels libres, conteste depuis plus d'un an devant les tribunaux le fait que ce contrat pour le renouvellement des systèmes d'exploitation du parc informatique de la Régie des rentes ait été donné à Microsoft sans le moindre appel d'offres. La petite entreprise estime que le gouvernement viole ainsi les règles de base d'attribution de contrats publics, en plus de se priver de milliers de dollars d'économie grâce à l'utilisation de logiciels moins coûteux.

 

Le 12 mars dernier, le juge Claude Bouchard, de la Cour supérieure du Québec, avait ordonné que certains éléments du contrat liant la Régie des rentes à Microsoft soient dévoilés à Savoir-faire Linux, pour que celle-ci puisse déterminer quelle est «la nature du contrat» et qui en sont les signataires. Deux mois et demi plus tard, aucun détail de l'entente n'a été transmis à l'entreprise, a appris La Presse. Savoir-faire Linux, aidée notamment de l'avocat Julius Gray, vient donc de s'adresser de nouveau à la Cour supérieure pour forcer les deux partenaires à se conformer à l'ordre du juge Bouchard.

Selon des documents déposés à la Cour cette semaine, la direction de Microsoft USA (Microsoft Licensing General Partnership) a tenu une téléconférence avec son avocat montréalais, Karim Renno, pour discuter du cas le 16 mai dernier. «L'impression que nous avons, c'est que Microsoft pilote tout le dossier», affirme Cyrille Béraud, président de Savoir-faire Linux.

«Que la multinationale refuse de nous transmettre le contrat tel que l'exige la Cour, ça ne me surprend pas vraiment. Mais que la Régie des rentes ait tant de mal à se plier à l'ordonnance du tribunal, je trouve cela plus inquiétant. Est-ce que Microsoft est au-dessus de l'État?» demande M. Béraud.

En avril dernier, La Presse révélait que le ministère de l'Éducation a également attribué sans appel d'offres un contrat de 1,32 million à Microsoft pour l'achat de 1800 licences de la suite Microsoft Office. La possibilité pour le Ministère d'utiliser plutôt la suite Open Office, un équivalent gratuit que Savoir-faire Linux propose à certains de ses clients, n'a pas été étudiée. Depuis, le gouvernement du Québec a déposé un projet de règlement interdisant aux organismes publics d'attribuer des contrats de gré à gré sans avoir au préalable «réalisé une recherche sérieuse et documentée» démontrant qu'aucun autre fournisseur ne peut offrir de produit répondant à leurs besoins.