Ayant pris connaissance de la preuve dans le meurtre et le démembrement de Shane Jimrattie, Nadège Merceus a ajusté son témoignage pour tout mettre sur le dos de son coaccusé, Michel Côté.

Voilà ce que Me Christian Gauthier, l'avocat de Côté, a tenté de faire admettre à Nadège Merceus, hier, pendant un contre-interrogatoire serré. La femme de 31 ans, grande consommatrice de drogues, soutient qu'elle était enfermée dans la salle de bains de leur appartement et en train de fabriquer du crack quand son conjoint, Michel Côté, a tué Jimrattie à coups de marteau, durant la nuit du 16 avril 2007, et l'a ensuite découpé en morceaux.

 

Selon son témoignage, c'est elle qui a appelé Jimrattie en pleine nuit pour obtenir de la drogue. Le jeune homme de 21 ans, qu'elle connaissait bien et qu'elle décrit comme sympathique, est venu livrer 1,7 gramme de cocaïne. Elle lui a remis les 125$ que coûtait cette commande, assure-t-elle. Elle ne peut expliquer pourquoi, contrairement à ses habitudes, Jimrattie n'a pas quitté les lieux immédiatement après sa livraison.

Selon la preuve, il n'avait d'ailleurs pas l'intention de s'attarder, car il avait garé sa voiture en double file, laissé le moteur en marche. Mme Merceus ne peut pas expliquer non plus pourquoi, soudainement, Côté a décidé d'assassiner Jimrattie, qu'il voyait pour la première fois de sa vie.

Me Gauthier a demandé à Mme Merceus si elle se plaçait dans la salle de bains, au moment fatidique, afin de s'enlever commodément de la scène de crime. Mme Merceus a répondu qu'elle fait toujours ça, «se mettre à l'écart» pour fabriquer du crack, car elle n'aime pas être vue en train de «cuire». Cela afin de ne pas l'enseigner aux autres...

La naïveté et l'ingéniosité

Me Gauthier a aussi tenté de faire dire à Mme Merceus que Michel Côté était un naïf alors qu'elle est beaucoup plus dégourdie (l'avocat a dit «streetwise»), ayant commencé à consommer avec sa propre mère et ayant essentiellement frayé dans le milieu de la drogue, avec des criminels et des prostituées, état qu'elle-même a connu. Pour sa part, Côté, 45 ans, a passé sa vie à Notre-Dame-de-la-Paix, un petit village en Outaouais, où il a longtemps été boucher, puis menuisier. Il s'est installé à Montréal en août 2006, pour faire des réparations dans les immeubles que son beau-frère possédait dans Rosemont. C'est là qu'il a rencontré Nadège Merceus, qui habitait chez un locataire d'un de ces immeubles. Côté s'est mis en ménage avec elle dès le début d'octobre, et il a quitté sa conjointe des 27 dernières années, qui était restée à Notre-Dame-de-la-Paix.

Mme Merceus vivait d'aide sociale et faisait des commissions de drogue pour payer sa consommation avant de fréquenter Côté. Quand elle habitait avec ce dernier, c'est lui qui la faisait vivre et qui payait son crack. Côté s'est mis à consommer lui aussi, même si elle ne voulait pas qu'il le fasse, jure-t-elle. Il est vite devenu accro et jaloux. Me Gauthier a alors fait remarquer au témoin que seul son ADN à elle a été retrouvé sur les nombreuses pipes artisanales découvertes par la police dans leur logement, après le crime.

Les restes de Shane Jimrattie ont été découverts le soir du 17 avril 2007, dans des sacs, dans la Ford Explorer de Côté. Les policiers ont alors envahi le quartier. Merceus soutient que Côté lui a dit de se sauver, et que lui s'en allait se pendre sur le toit. Côté s'est fait arrêter ce soir-là, tandis qu'elle a réussi à passer le cordon policier. Le soir même, elle a rencontré un autre homme, avec qui elle s'est rapidement mise en ménage. Il s'agit de Jean-Sébastien Brunelle, avec qui elle a fini par se battre. Ils consommaient abondamment.

En fin d'après-midi, c'est la procureure de la Couronne, Hélène Di Salvo, qui a pris la relève. Son contre-interrogatoire, musclé également, se poursuivra ce matin. Rappelons que Michel Côté, 45 ans, et Merceus, 31 ans, sont conjointement accusés du meurtre de Jimrattie et d'outrage à son cadavre.