La mère de Francis Proulx, accusé du meurtre prémédité de l'attachée politique Nancy Michaud, a déclaré vendredi que son fils avait commis ce geste fatal après avoir été transformé par un médicament traitant son anxiété.

Lise Hudon, une femme frêle âgée de 51 ans, a affirmé au jury qu'elle avait commencé à remarquer un changement dans le comportement de son fils, en 2007, quand elle est revenue habiter dans la région du Bas-Saint-Laurent, après plusieurs années loin de lui.

Selon Mme Hudon, qui est entrée dans la salle d'audience avec son livre des Saintes Ecritures à la main, Proulx était plus renfermé et agressif verbalement qu'auparavant.

«Il n'était plus le même, a-t-elle dit. On ne change pas comme ça: un agneau qui devient un loup, un sage qui devient à moitié fou.»

Pour Mme Hudon, ce changement est attribuable au médicament que son fils prenait. Elle a soutenu que n'importe qui, suivant ce traitement, aurait pu en arriver aux mêmes excès qui l'ont mené à tuer Mme Michaud, en mai 2008, dans la petite municipalité de Rivière-Ouelle.

«Ca se sentait qu'il était déboussolé, déconnecté, a-t-elle dit. Même un aveugle verrait aussi clair. Ca nous dépasse complètement. Ca aurait pu arriver à n'importe qui avec des médicaments comme ça.»

Assis derrière les grandes baies vitrées du box des accusés, après avoir lui-même témoigné au cours des derniers jours, Proulx a écouté sa mère parler sans la regarder, les yeux baissés derrière ses lunettes rondes à monture métallique dorée.

Son attitude contrastait avec la forte réaction qu'il a eue plus tôt, lorsque sa grand-mère, Lorraine Point, est entrée dans le tribunal pour témoigner elle aussi.

Proulx, âgé de 29 ans, a alors fondu en larmes et il lui a fallu quelques minutes pour retrouver sa contenance. Il a ensuite écouté attentivement les déclarations de la dame, avec qui il a habité à partir de l'âge de 14 ans, jusqu'à ce qu'il emménage seul, à quelques maisons de la résidence familiale, six mois avant que le cadavre de Mme Michaud soit retrouvé.

A la barre, Mme Point a décrit son petit-fils comme un enfant obéissant qui était demeuré marqué par le divorce de ses parents, survenu quand il avait deux ans.

«Il était tranquille mais à deux ans il ne parlait pas encore, parce qu'il avait vécu une épreuve, a-t-elle dit. C'était pas un enfant qui demandait de 'surplus'. Il était sensible, émotif mais gardait ça en-dedans.»

Mme Point, une dame de 75 ans à la chevelure toute blanche, a déclaré au jury que son petit-fils avait eu des problèmes d'anxiété qui ont nécessité qu'il prenne un médicament, l'Effexor, qu'il utilise encore à ce jour.

A partir de 2006, elle a commencé à remarquer un changement dans le comportement de Proulx, qui a quitté la résidence familiale quelques semaines après avoir volé 5000 $ à sa grand-mère.

«On aurait dit qu'il y avait toujours quelque chose qui le tracassait, a-t-elle dit. Il était très renfermé. Il ne parlait pas beaucoup de ses émotions.»

La semaine dernière, l'avocat de la défense, Jean Desjardins, a affirmé que son client n'était pas en mesure d'évaluer les conséquences de ses actes à cause de maladies mentales héréditaires et de son médicament contre l'anxiété.

Vendredi, Lise Hudon a affirmé aux jurés qu'elle avait séjourné à plusieurs reprises dans des hôpitaux psychiatriques à la suite de dépressions et qu'en 1997, un médecin a diagnostiqué qu'elle souffrait de «schizophrénie affective».

«Je suis de nature très vulnérable, très sensible et fragile», a-t-elle dit.

En 1992, Mme Hudon a été baptisée par les Témoins de Jéhovah.

«C'est ma raison de vivre et de survivre», a-t-elle dit.

Selon elle, son fils ne s'est pas fait baptiser lui-même parce qu'il est plus «insécure» qu'elle.

Mais, a-t-elle dit, «au fond de son coeur, c'est un être intègre spirituellement».

Vendredi matin, une grand-tante de Francis Proulx, Gisèle Hudon, est aussi venue témoigner pour dire au jury qu'elle avait pris soin pendant 50 ans de sa soeur, aussi grand-tante de l'accusé, souffrant de maladie mentale.

Avant de suspendre le tribunal jusqu'à lundi, le juge Jacques Lévesque a fait une mise en garde aux jurés afin qu'ils ne se laissent pas influencer par la façon dont les faits exposés au procès sont présentés par des animateurs de stations de radio qu'il n'a pas identifiées.

Il a rappelé que les médias doivent respecter le droit de l'accusé à un procès équitable.

«Il ne faut pas vous préoccuper de ce que rapportent les médias et de la façon dont ils le font», a-t-il dit.