Guy Lafleur soutient qu'il n'a jamais voulu tromper la Cour en omettant de dire au tribunal, le 19 septembre 2007, que son fils Mark était allé coucher à l'hôtel plutôt qu'au domicile familial. «Je n'y ai pas pensé. Pour moi, l'important, c'était qu'il respecte son couvre-feu et qu'il ne consomme pas.»

C'est l'explication qu'il a donnée et à laquelle il s'est accroché, hier, lorsqu'il a témoigné à son procès, sous l'accusation d'avoir livré des témoignages contradictoires. Il s'agit d'un crime voisin du parjure, passible d'un maximum de 14 ans de prison, et qui exclut la possibilité d'une absolution conditionnelle. La procureure de la Couronne, Lori Weitzman, trouve que l'explication de M. Lafleur ne tient absolument pas la route, car les questions qui lui avaient été posées à l'époque étaient très claires. Me Jean-Pierre Rancourt, avocat de M. Lafleur, considère pour sa part que son client n'avait pas l'intention spécifique de tromper la Cour. Il convient que l'explication de son célèbre client peut paraître ambiguë, mais croit qu'elle est plausible. Bref, selon lui, M. Lafleur devrait bénéficier du doute raisonnable. Le juge rendra sa décision le 1er mai.

Les faits reprochés sont survenus en septembre et octobre 2007, alors que le fils de Guy Lafleur, Mark, alors âgé de 22 ans, avait été expulsé de la maison de thérapie où il était placé, et que, ce faisant, il était retourné en prison. Le jeune Lafleur essayait alors de recouvrer la liberté, et son père avait été appelé à témoigner en sa faveur et à se porter garant de lui.

Le juge Claude Parent a pu entendre les deux témoignages, hier. Dans le premier, le 19 septembre 2007 devant le juge Robert Sansfaçon, Guy Lafleur a affirmé que son fils avait toujours respecté son couvre-feu et qu'il était rentré coucher à la maison tous les soirs, lorsqu'il avait obtenu des permissions de fin de semaine de la maison de thérapie. C'était une des conditions qu'il devait respecter. Dans le second témoignage, le 15 octobre devant la juge de la Cour supérieure Carol Cohen, M. Lafleur a admis que son fils était allé coucher à l'hôtel «à deux reprises» afin d'avoir son intimité avec sa nouvelle copine. M. Lafleur venait d'apprendre, le matin même, que la Couronne était au courant de ces escapades, et qu'elle avait en mains les factures de l'hôtel, le Holiday Inn de Pointe-Claire.

«J'ai tout fait pour l'aider»

Hier, Me Weitzman a fait subir un contre-interrogatoire très serré à M. Lafleur. Celui-ci a admis qu'au moment où il a témoigné devant le juge Sansfaçon, il voulait que son fils recouvre la liberté et vienne habiter chez lui. Mais il n'y avait pas de cachotterie, a-t-il laissé entendre. «Mark travaillait, il faisait de gros efforts pour s'en sortir, et il en fait encore... J'ai peut-être fait l'erreur de l'envoyer à l'hôtel, mais pour moi ses conditions étaient respectées... Dans mon esprit, le couvre-feu, ça ne voulait pas dire nécessairement à la maison... C'est mon fils, j'ai tout fait pour l'aider et je vais continuer à le faire», a notamment dit M. Lafleur.

La légende du hockey a aussi avoué avoir vécu l'enfer pendant deux ans, à cause des problèmes judiciaires de son fils. «C'est stressant, savoir que les journalistes épient chacun de tes mots», a-t-il dit.

Me Weitzman concède que la cause de Guy Lafleur a un côté sympathique, voire triste, car il s'agit d'un père qui a voulu aider son fils. Pour elle, il ne fait cependant aucun doute que M. Lafleur est coupable, car lorsque «quelqu'un jure faussement, c'est toujours pour induire la Cour en erreur», a-t-elle soutenu.

«Il a voulu tout faire pour son fils, notamment mentir à la Cour. Il n'a pas été fidèle à son serment», a-t-elle plaidé. Elle considère que lorsqu'il y a un motif louable, cela peut être pris en compte, si l'accusé est reconnu coupable, quand viendra le moment de déterminer la peine.