Un incendie d'origine suspecte a réduit en cendres hier 96 appartements en copropriété en construction dans le controversé projet immobilier du Faubourg Contrecoeur, dans l'est de Montréal. Le promoteur, Construction Frank Catania et associés, avait suspendu les travaux en raison d'un litige avec la SHDM et la Ville. Dans le voisinage, l'incendie ne semblait surprendre personne hier. Les propriétaires de ces appartements, déjà exaspérés par les nombreux délais de livraison, devront quant à eux prendre leur mal en patience.

Un violent incendie d'origine suspecte a réduit en cendres hier plusieurs immeubles en construction du Faubourg Contrecoeur, un projet immobilier du promoteur Frank Catania qui se trouve au coeur d'une controverse depuis l'automne.Le feu a pris naissance autour de 5h40 hier matin, dans ce secteur en développement de l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, à l'angle des rues Sherbrooke Est et Contrecoeur. Durant plusieurs heures, une centaine de pompiers ont combattu les flammes, qui embrasaient 96 appartements répartis dans six immeubles. L'incendie a débuté dans un des bâtiments, avant de se répandre vers les cinq autres. Les six immeubles incendiés sont une perte totale.

Personne n'a été blessé, puisque les immeubles encore en chantier n'étaient pas occupés. Une épaisse fumée noire, visible à des kilomètres à la ronde, couvrait le ciel de l'est de la métropole, jusqu'à ce que les sapeurs viennent enfin à bout du brasier en matinée.

Comme les bâtiments ravagés étaient aménagés sur un terrain en retrait, les voisins de ce secteur résidentiel n'ont pas eu besoin d'évacuer leurs demeures. Plusieurs d'entre eux ont passé de longues heures à observer le spectaculaire incendie, debout en bordure des cordons policiers déroulés autour d'un vaste périmètre de sécurité.

À quelques mètres du sinistre, un tronçon de la rue Jacques-Porlier était voilé par un épais brouillard. Préoccupés par d'immenses tisons qui atterrissaient sur leurs terrains, quelques résidants de la rue avaient grimpé sur leur toit pour s'assurer de ne pas être atteints.

«C'est la chaleur qui nous a réveillés ce matin. Au début, on ne voyait que des flammes», a expliqué Claudette, dont la cour donne directement sur le chantier.

Des débris de cendre flottaient dans sa piscine. À travers la fumée qui se dégageait du Faubourg Contrecoeur, on apercevait au loin les cheminées des raffineries de l'est de Montréal.

Le SPVM ouvre une enquête

La section des incendies criminels du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) a hérité du dossier, puisque les pompiers ont été incapables de déterminer hors de tout doute qu'il s'agissait d'un incendie accidentel. Selon les premières constatations du SPVM, la propagation de l'incendie pourrait être accidentelle, provoquée par les vents qui soufflaient hier matin. Il était encore trop tôt par contre pour déterminer si le foyer d'incendie est de nature criminelle ou accidentelle.

Selon le SPVM, un gardien de sécurité se trouvait dans une roulotte près du chantier lorsque le brasier a pris naissance. C'est lui qui a contacté le 911.

Dans le voisinage, l'incendie au Faubourg Contrecoeur ne semblait surprendre personne. «Le chantier a été la cible de plusieurs actes de vandalisme, comme des bris de vitres et de portes-fenêtres. On aurait dit que le projet n'était pas le bienvenu», a souligné Michel Morin, un résidant du secteur.

Des consultations publiques houleuses avaient d'ailleurs été tenues dans l'église du secteur avant l'autorisation du projet. Ce dernier ne faisait apparemment pas l'unanimité.

Sur les ondes de la Première Chaîne de Radio-Canada, le président de Catania, Paolo Catania, a évoqué un bris mécanique ou un geste mal intentionné de jeunes pour expliquer ce sinistre. «Un électricien qui a dû mal laisser les fils, des conduits de gaz qui n'étaient pas bien sécurisés, ça arrive dans les chantiers de construction. Ou des jeunes qui s'amusaient à faire des feux là-dedans. On voit ça souvent sur des chantiers (...) C'est ce que je peux penser.»

Le projet du Faubourg Contre-coeur avait fait couler beaucoup d'encre en automne dernier. La Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), qui avait racheté le terrain à la Ville, l'avait par la suite vendu à l'entreprise Catania à un prix inférieur à l'évaluation municipale. Martial Fillion, le directeur général de la SHDM, avait alors été congédié après que la firme de vérification KPMG eut levé le voile sur certaines irrégularités dans le dossier.