Qu'ils le veuillent ou non, trois témoins clés de la mort de Fredy Villanueva - son frère Dany ainsi que ses amis Denis Méas et Jeffrey Sagor Métellus - devront témoigner à l'enquête publique du coroner.

Quant au reste de la famille Villanueva, elle menace de boycotter l'enquête si les honoraires des avocats des trois témoins ne sont pas payés par l'État.Les trois jeunes hommes, présents lors de l'intervention policière du 9 août dernier dans Montréal-Nord, ont reçu récemment une citation à comparaître du président de l'enquête, le juge Robert Sansfaçon. S'ils ne s'y présentent pas, ils pourraient faire l'objet d'un mandat d'arrêt. MM. Méas et Métellus ont été blessés par les balles de l'un des deux policiers impliqués dans l'incident.

En plus d'exiger le paiement des honoraires des avocats des trois jeunes, la famille Villanueva a réclamé plus de temps pour se préparer à l'enquête, qui doit débuter le 16 février au centre judiciaire Gouin.

«Nous, comme famille, on est les personnes les plus intéressées, les plus touchées et on est prêts à attendre. On aimerait demander au juge Robert Sanfaçon d'accorder plus de temps à nos avocats pour étudier toute la preuve», a dit la soeur de Fredy, Patricia Villanueva, entourée de ses parents et de son frère, Dany. Ni le Bureau du coroner ni le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, n'ont voulu commenter.

«Je veux la vérité. Je veux que justice soit faite. Je veux que l'enquête publique démontre vraiment ce qui s'est passé, que les policiers ont mal agi», a dit pour sa part Denis Méas.

La famille Villanueva accuse le gouvernement québécois d'avoir failli à sa promesse de payer les honoraires des avocats chargés de les conseiller durant l'enquête. De son côté, le Ministère affirme avoir toujours été très clair à ce sujet. «Notre position est la même depuis le 2 décembre dernier. On a dit qu'on paierait les honoraires de l'avocat de la famille Villanueva durant l'enquête. C'est une mesure exceptionnelle prise par le Ministère par compassion pour la famille», a expliqué David Couturier, directeur des communications au cabinet du ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis.

Rien dans la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès n'oblige l'État à payer les honoraires des avocats des témoins à une enquête du coroner, précise M. Couturier. Ce serait différent si c'était une commission d'enquête, qui elle, est assujettie à une autre loi.

Les avocats de la famille Villanueva et des deux autres jeunes ne décolèrent pas. «Sans moyens, ce sera une enquête futile. Ce sera la répétition de l'enquête qui s'est déroulée sur les policiers (contre qui aucune accusation criminelle n'a été portée)», a dit Me Peter Georges-Louis. «Est-ce que ce gouvernement veut la vérité ou il veut juste un cover all (mise en scène) pour entériner la décision du procureur? S'il veut aller au fond des choses, qu'il assume les frais et qu'il donne des moyens à toutes les familles impliquées dans cet événement malheureux du 9 août», a demandé Me Jacky Salvant, avocat de Denis Méas.

Les avocats de la famille y voient une justice à deux vitesses puisque les policiers liés au dossier de Fredy Villanueva ont droit à six avocats, ont-ils dénoncé. Faux, répond l'inspecteur-chef des communications à la police de Montréal, Paul Chablo. Le policier Jean-Loup Lapointe, qui a atteint mortellement Fredy Villanueva, et sa partenaire de patrouille, Stéphanie Pilotte, ont droit à un avocat chacun, dont les honoraires sont payés par la Ville de Montréal.

Au moins une soixantaine de personnes seront entendues au cours de l'enquête, qui devrait durer au moins trois semaines, a par ailleurs indiqué le Bureau du coroner, hier.