Alléguant avoir été détenu arbitrairement au Maroc puis contraint sous la menace de collaborer avec le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), un Canadien d'origine marocaine, Mohamed Omary, réclame plus de 1 million de dollars en dommages au Procureur général du Canada.

L'homme de 43 ans, qui réside dans l'arrondissement de Saint-Laurent avec sa femme et ses quatre enfants, reproche particulièrement à la GRC et au Service canadien du renseignement, d'avoir échangé des informations à son sujet avec la police marocaine (Défense et sécurité du territoire). Cet échange aurait provoqué son arrestation à son arrivée à l'aéroport de Casablanca en janvier 2002. Selon ses dires, s'il était retourné dans son pays à ce moment-là, laissant femme et enfants au Canada, c'était pour «se reposer auprès de ses oncles et tantes», parce qu'il avait été très affecté par la publication de reportages réalisés par Radio-Canada et La Presse, le présentant comme membre d'une cellule terroriste dormante à Montréal. C'est ce qu'il explique dans la poursuite qui a été déposée au palais de justice de Montréal.

La police marocaine lui a confisqué son passeport canadien dès son arrivée à l'aéroport en janvier 2002, si bien qu'il a dû rester au Maroc pendant plus d'un an et demi, manquant ainsi la naissance d'un de ses enfants. Pendant cette période, des policiers marocains le talonnaient, le harcelaient et le menaçaient pour obtenir des informations sur des personnes qu'il avait connues au Canada.

À un certain moment, deux enquêteurs du SCRS se seraient mis de la partie pour faire pression sur lui. Tout cela s'inscrivait dans le cadre des efforts de lutte au terrorisme, qui s'étaient intensifiés après les attentats de septembre 2001.

M. Omary a pu rentrer au Canada en septembre 2003. Des agents du SCRS l'auraient alors talonné à leur tour pour qu'il collabore avec leur service. En 2005, il est retourné en vacances au Maroc avec sa femme et ses enfants, et aurait encore subi des pressions de la police marocaine. Il est revenu au Canada avec sa famille, en août de la même année.

Si M. Omary avait été ciblé, c'est qu'il était, entre autres, un grand ami de Fateh Kamel, qui a vécu à Montréal. En avril 1999, Kamel a été arrêté puis condamné en France à huit ans de prison pour trafic de faux papiers. Dans les années précédentes, Kamel et Omary s'étaient rendus ensemble en Bosnie et en Croatie. M. Omary soutient que c'était pour faire du «travail humanitaire auprès des réfugiés». Mais les services de renseignements croient plutôt que Kamel dirigeait un bataillon de moudjahidines.

Arrivé au Canada en 1987, M. Omary se décrit comme un informaticien travailleur autonome. Marié en 1993, il a quatre enfants, dont l'un se prénommerait Oussama, selon les archives de La Presse.