Bien qu'un supérieur leur ait ordonné sur les ondes radio de cesser la poursuite, le matin du 12 octobre 2005, les policiers Roberto Sforza et Fabio-Nicola Cavaliere ont continué de pourchasser la voiture des fuyards, dans laquelle se trouvait Anne-Marie Péladeau.

C'est ce qui se dégage du témoignage qu'a livré la lieutenante du SPVM Panagiota Tzaninis, hier, au procès des agents Sforza et Cavaliere. Ces derniers sont accusés d'avoir brutalisé Mme Péladeau en l'arrêtant, au terme de la poursuite.

Le jour de l'incident, Mme Tzaninis agissait comme sergent superviseur à Montréal-Nord. Vers 8h05, elle a entendu, sur les ondes de son véhicule, qu'une poursuite avait été enclenchée par la voiture 42-4, celle des agents Sforza et Cavaliere. Comme c'était dans son secteur, elle a pris charge de cette poursuite en tant que supérieur. «J'ai demandé le motif, on m'a dit que c'était pour vol à l'étalage.» Selon ses notes, la poursuite a commencé à l'angle des boulevards Pie-IX et Industriel, s'est déroulée sur 4,9 km, et a duré 2 minutes 35.

Tant que les véhicules ont roulé sur le boulevard Industriel, la superviseure les a laissé aller, car il n'y pas de trottoir à cet endroit. Une fois que les véhicules se sont engagés sur le boulevard Lacordaire, c'était plus risqué. «C'était l'heure de pointe, il y avait des piétons et du trafic, et les fuyards ne voulaient pas arrêter», a-t-elle dit hier. Elle a décidé de lancer un «10-10». Dans le jargon policier, ça signifie d'arrêter l'action en cours. Comme réponse du véhicule en poursuite, elle a obtenu: «10-10 capté.» Malgré cela, la poursuite a continué, dit-elle. Comme il y avait des bruits de sirène dans la radio, Mme Tzaninis s'est demandé si son message avait vraiment été entendu. Elle a lancé un autre 10-10. Une minute et 20 secondes plus tard, elle a entendu, à la radio, «Suspect maîtrisé». Elle s'est rendue sur les lieux de l'arrestation, à l'angle du boulevard Lacordaire et de la rue Des Galets. Ce n'est que plus tard qu'elle a appris que le policier Cavaliere avait été blessé, dit-elle.

Le calme est revenu

Par ailleurs, une vidéo d'une vingtaine de minutes montrant l'arrivée de Mme Péladeau au poste de police, ainsi que la procédure pour l'écrouer, a été montrée au tribunal, hier. Elle est arrivée avec les policiers Sforza et Cavaliere, au Centre opérationnel Est, à 8h22. Tout le monde semblait très calme, y compris Mme Péladeau. Selon le policier Carl Melançon, qui supervisait la procédure d'écrou, la détenue était passive et coopérative. Elle avait une «légère coupure» à l'arcade sourcilière. Il a nettoyé la plaie avec de l'alcool, et a décidé que ça méritait d'être vu par Urgences-santé. Il a donc fait venir les ambulanciers, qui ont amené Mme Péladeau à l'hôpital. En ce qui concerne Cavaliere, il a résumé l'événement à M. Melançon, mais n'a pas mentionné qu'il avait été blessé. Dans les minutes suivantes, il est allé voir un enquêteur et lui aurait confié qu'il avait été renversé par le véhicule des fuyards. Cavaliere est parti à l'hôpital, et Sforza l'a accompagné.