Une centaine de policiers a procédé hier matin à une rafle majeure dans le but de démanteler un vaste réseau de trafic de cocaïne lié aux motards et dont les ramifications s'étendaient jusqu'au Mexique. Quelques vétérans de la pègre, de même qu'un autre ancien comédien de l'émission Omerta, sont au nombre des accusés.

Le Service d'enquête sur le crime organisé de la Sûreté du Québec, appuyé par l'escouade régionale mixte de l'Outaouais, la Gendarmerie royale du Canada et différents corps municipaux ont procédé à l'arrestation de 46 suspects. Au total, 51 personnes étaient visées par des mandats d'arrestation, 49 au Québec et deux à Vancouver. Les suspects ont été épinglés vers 6h hier matin dans plusieurs régions, notamment à Montréal, dans les Laurentides, en Outaouais, en Estrie, à Ottawa et à Vancouver.

Le réseau, relié aux Hells Angels, écoulait plusieurs centaines de kilos de cocaïne par année. La drogue provenait du Mexique et transitait par la côte Ouest américaine jusqu'à Vancouver. De là, elle était acheminée en voiture jusqu'à Montréal, où on l'entreposait quelques jours avant de la distribuer.

Ce coup de filet était la troisième étape d'une enquête amorcée en 2006 dans le cadre du projet Croisière. Des perquisitions ont eu lieu dans ce dossier à deux reprises au printemps 2008.

Les vétérans

Les policiers ont notamment mis la main au collet de Raymond Sigouin, 67 ans, et Robert Brunet, 62 ans, d'anciens braqueurs de banques notoires recyclés dans le trafic de stupéfiants, qui collaborent depuis des décennies.

Au début des années 70, Sigouin était considéré par la police comme le criminel numéro un au Québec. Objet d'un attentat en 1999, il était l'un des membres les plus connus de la pègre montréalaise. Ex-spécialiste de la gâchette, il trempait dans les années 60 et 70 dans des vols de banque et des braquages de camions blindés. Il a écopé d'une peine de prison après l'attentat dont il a été victime en 1999. Son frère, Marcel Sigouin, a été abattu en 1993 au cours d'une tentative ratée d'assassiner un fraudeur associé à la pègre italienne montréalaise.

Diquinzio toujours au large

Après Tony Conte, accusé de trafic de stupéfiants le 30 octobre dernier, un autre comédien de la populaire série Omerta se retrouvera au banc des accusés. Encore en cavale au moment de mettre sous presse, Bruno Diquinzio, 42 ans, faisait déjà l'objet d'un mandat pour son rôle dans plusieurs crimes, notamment le trafic de stupéfiants et le blanchiment d'argent. En plus d'avoir défendu un petit rôle dans la série québécoise, Diquinzio avait tourné en 2000 un film au titre évocateur, Bonanno: A Godfather's Story.

En plus de Diquinzio, trois autres suspects sont toujours au large.

Quant à la tête dirigeante du réseau démantelé hier, il s'agirait de Lionel Gauthier, 67 ans, décrit comme un très proche sympathisant des Hells Angels de Sherbrooke et de Montréal.

Les autres responsables seraient Robert Brunet, 62 ans, de Saint-Calixte; Mario Cariello, 46 ans, de Montréal; Richard Paré, 42 ans, de Rosemère; Michel Lecompte, 46 ans, de Gatineau; Nino Pollastrini, 42 ans, d'Ottawa, et Roke Vaillant, 39 ans, de Woodland.

Certains prévenus étaient connus dans leur communauté. L'un d'eux, Nino Pollastrini, est propriétaire du Giovanni's, un chic restaurant de fine cuisine italienne d'Ottawa. Pollastrini aurait agi comme argentier de l'organisation.

Enfin, Antonio Milioto et ses fils Calogero et Tony, de Montréal, sont des personnages bien connus dans le monde interlope.

Plusieurs accusés ont comparu hier à Montréal et à Hull. La majorité ont retrouvé leur liberté sous cautionnement, moyennant des dépôts de 5000$ à 15 000$. La suite du processus judiciaire a été fixée à lundi. Toutefois, les accusés n'auront pas à se présenter devant le juge. Les personnes arrêtées sont entre autres accusées de trafic de stupéfiants, de gangstérisme et de complot, pour des gestes commis entre avril 2007 et mai 2008.

La SQ n'était toujours pas en mesure d'indiquer depuis quand le réseau était actif, ni s'il entretenait des liens avec une organisation étrangère.

Avec la collaboration de Christiane Desjardins et Marcel Laroche