Des pleurs ont fusé des deux côtés de la salle d'audience, lundi, quand le juge Robert Sansfaçon a acquitté Diane Lauzon, 45 ans, d'une accusation de conduite dangereuse ayant causé la mort. La victime, Érica Cadieux, 34 ans, a été fauchée sur le trottoir l'après-midi du 27 janvier 2006, alors qu'elle promenait sa fillette en poussette.

« Il n'y a pas de gagnant. Mme Lauzon ne peut pas être contente du résultat. Ma fille était avocate. C'est un peu ironique que sa mort soit considérée comme un accident. Je pense qu'elle se serait objectée », a commenté la mère de la victime, Yolande Cadieux, avant d'ajouter que c'est difficile pour la famille, mais qu'il faut accepter. L'accident est survenu sur le boulevard Lakeshore, à Beaconsfield. Mme Lauzon, une enseignante elle-même mère de trois enfants, était en congé sabbatique à ce moment. Elle revenait de faire une course, vers 13 h, quand son VUS a frappé une congère, grimpé sur le trottoir et percuté la victime. Sous l'impact, la mère, la poussette et l'enfant ont été projetés dans les airs et ont atterri dans l'entrée d'une maison. La fillette de 18 mois s'en est miraculeusement tirée sans blessure, tandis que sa mère est décédée. Complètement bouleversée et en état de choc, Mme Lauzon confiait à des gens, notamment à la femme qui a appelé le 9-1-1, ainsi qu'aux ambulanciers qui la transportaient à l'hôpital, qu'elle s'était « endormie ». Elle était rentrée de Las Vegas le matin même, par un vol de nuit, après un périple de trois jours avec sa soeur et son beau-frère. Ils étaient allés voir les spectacles de Céline Dion et du Cirque du Soleil.

Quoi qu'il en soit, les propos de Mme Lauzon au sujet de son endormissement au volant ont été écartés de la preuve par le juge Robert Sansfaçon. Et hier, lorsqu'elle a témoigné, elle a fait valoir qu'elle ne savait pas ce qui s'était passé. « Je me rappelle avoir traversé l'intersection Saint-Charles, c'est tout. Après, j'ai vu un carrosse se projeter hors de la route, en diagonale. » Elle a soutenu que son voyage à Las Vegas avait été « très reposant », et qu'elle avait dormi dans l'avion. Elle n'était donc pas si fatiguée que cela le jour du drame. Elle a parlé de sa dévastation face à l'accident : « Une situation irréelle, surréelle, un vrai cauchemar, une punition naturelle, un fardeau incroyable... »

Pas criminellement responsable

Après les plaidoiries des avocats, hier après-midi, le juge Robert Sansfaçon a rendu jugement séance tenante. Certes, Mme Lauzon a conduit d'une façon dangereuse en grimpant sur le trottoir avec son VUS. C'est une faute civile extrêmement grave, a fait valoir le juge. Mais il n'y a aucune preuve d'intention de créer un danger, a expliqué le magistrat. Il a conclu qu'il s'agissait d'une « inattention momentanée », pour laquelle Mme Lauzon ne pouvait être tenue criminellement responsable.

L'époux de la victime, Carlo Spadafora, a perdu l'amour de sa vie, et il devra un jour expliquer tout cela à ses bambines qui ont maintenant 3 et 4 ans. En tant qu'avocat - il pratique le droit corporatif et commercial -, il comprend les règles du processus judiciaire. Mais il avoue que son coeur est d'un autre avis. Il a l'intention de faire pression pour que la loi sévisse contre l'endormissement au volant.

Quant à Mme Lauzon, elle a quitté le palais de justice rapidement après son acquittement, entourée de ses proches qui faisaient écran entre elle et les médias.