François Bérard, criminologue et intervenant depuis plus de 20 ans dans Montréal-Nord, ne mâche pas ses mots. D'un côté, il y a le commandement du poste de quartier et les «sociocoms», avec qui il entretient une relation étroite. De l'autre, certains patrouilleurs arrogants qui semblent torpiller tous les efforts de rapprochement. «On a l'impression de se faire faire un enfant dans le dos!»

Après l'émeute d'août, le petit monde du communautaire de Montréal-Nord s'est réuni pour comprendre ce qui s'est passé. Pauvreté, exclusion, gangs de rue... Tous les fléaux qui sévissent à Montréal-Nord ont été évoqués. Mais les relations avec des policiers arrogants laissent supposer que le feu couvait depuis un bout de temps.

 

«On avait chacun entendu des échos», dit François Bérard. En compilant ces histoires, les membres du mouvement ont conclu qu'il ne s'agissait pas d'un hasard.

Les relations avec les agents sociocommunautaires et le commandement du poste de quartier sont bonnes, dit François Bérard. Le problème serait plutôt dans la rue. «Un petit groupe de patrouilleurs a un problème d'attitude», dit M. Bérard, qui connaît très bien le quartier de Montréal-Nord.

Il relate des exemples qui ont été évoqués lors des rencontres des organismes. «Une personne âgée, blanche, francophone de souche, environ 70 ans, qui va au marché rue Pascal. Il est 20h30, et elle se fait aborder par une patrouille qui lui dit: «Eille, vieille crisse, tu sais pas que c'est dangereux de sortir le soir par ici?»»

Plus la peau est foncée, plus «c'est de la xénophobie qui va être exprimée de façon ouverte par le même groupe de policiers», dénonce-t-il. «Et les gens nous ont dit que, lorsqu'il s'agit de Noirs, ils se font écoeurer tout le temps, dès que ces policiers-là font leur quart de travail. Du genre, un jeune de 18 ou 19 ans qui s'en va travailler avec sa boîte à lunch, qui se fait accoster par les policiers et se fait dire: «Où tu t'en vas, le nèg'? Les nèg's, ça travaille pas, c'est connu!» Et ce que je vous dis là, ce ne sont pas des Noirs qui me l'ont rapporté, ce sont des francophones de souche qui ont vu leurs amis se faire traiter comme ça.»

Des ponts à reconstruire

Les ponts entre la police et les citoyens devront être reconstruits dans l'arrondissement. Pour François Bérard, ça passe par un changement d'attitude des policiers du quartier. «Il y a peut-être des gens qui devraient être déplacés ou qui n'ont pas leur place dans la police.»

Ces commentaires ont fait tant de remous qu'ils se sont rendus jusqu'au commandant Roger Bélair, du poste de quartier de Montréal- Nord. «On nous a fait part de ces faits-là. On a déjà fortement réagi dans le poste. On a dit aux policiers que, malgré les événements, il fallait garder le plus grand respect à l'endroit de la population», explique le commandant. «On ne se ferme pas les yeux.»

Cependant, le patron du poste 39 n'a pas été enmesure d'identifier les policiers qui auraient formulé ces commentaires désobligeants. «On encourage la population à continuer de dénoncer ces situations et à prendre en note la date et l'heure de tels événements», conclut-il.