La mort violente de Clémence Beaulieu-Patry au supermarché Maxi est-elle le « fruit du cerveau malade » d'un homme en plein délire ou le point culminant d'un geste planifié par un jeune homme éconduit qui tente maintenant de « réécrire l'histoire » ? La défense et la Couronne ont plaidé au jury deux versions divergentes, hier, à la toute fin du procès pour meurtre prémédité de Randy Tshilumba.

« Il souffrait d'une maladie mentale. Il a tué l'objet de son délire, Clémence Beaulieu-Patry. Une jeune fille innocente qui ne demandait qu'à vivre », a clamé l'avocat de la défense Philippe Larochelle lors des plaidoiries. Deux psychiatres, a-t-il répété, ont diagnostiqué un trouble mental distinct au jeune homme de 21 ans : trouble délirant et schizophrénie paranoïde.

Ainsi, le geste « tellement inattendu, tellement violent » de Randy Tshilumba s'ancre dans son profond « délire » : il était persuadé depuis des mois que cinq jeunes femmes, dont Clémence Beaulieu-Patry, voulaient le tuer, soutient Me Larochelle. C'est pourquoi le jury devrait déclarer l'accusé non criminellement responsable du meurtre de Clémence Beaulieu-Patry, a-t-il plaidé.

IL A « RÉÉCRIT L'HISTOIRE » APRÈS SON ARRESTATION

Oui, Randy Tshilumba souffre aujourd'hui d'une maladie mentale, convient la procureure de la Couronne Catherine Perreault. Or, ce n'était pas le cas en avril 2016, dit-elle. Au moment de poignarder à 14 reprises Clémence Beaulieu-Patry, l'accusé était « conscient du caractère mauvais de son geste ». C'est seulement après son arrestation qu'il a « réécrit l'histoire » en se convainquant que son geste « était moralement correct » et qu'il se sentait « attaqué par la victime », a-t-elle suggéré au jury.

Le jour fatidique et la veille, Randy Tshilumba s'est rendu au Maxi du quartier Saint-Michel, son couteau dans les poches, avec « l'intention de tuer Clémence », a plaidé Me Perreault. Les éléments de préméditation sont nombreux, assure-t-elle : il apporte des vêtements de rechange dans son sac à dos pour « modifier son apparence », il enfile ses gants de football seulement à son arrivée, il se cache pendant des heures dans les toilettes des femmes du Tim Hortons et il cache son couteau au cégep. Puis, ajoute-t-elle, il recherche sur internet « Comment se débarrasser de l'arme du crime » et « Comment faire le crime parfait ».

« On ne peut pas trouver d'explication rationnelle par rapport à M. Tshilumba et les gestes de son délire », rétorque Me Larochelle. Le port des gants ne doit pas être considéré de façon isolée, a-t-il dit. « C'est dur de se mettre dans la tête d'une personne qui souffre de délire. » Mais une chose est sûre, martèle Me Larochelle : Randy Tshilumba ne « simule pas ». La preuve, il avait confié son « délire » à son meilleur ami avant le meurtre.

La procureure de la Couronne s'est attaquée à la crédibilité des deux psychiatres hier. « Le problème avec l'opinion des experts, c'est qu'ils utilisent certaines parties du raisonnement de l'accusé, où ils vont simplement reprendre la version de l'accusé, mais pas l'ensemble », dit-elle.

La juge Hélène Di Salvo prononcera ses directives au jury lundi.