Bertrand Charest avait secrètement des relations sexuelles avec trois skieuses de son équipe, en 1997 et 1998. Quand l'une d'elles, Nancy*, l'a affronté à ce sujet, M. Charest avait une explication : il couchait avec Chantal* parce qu'elle avait besoin de sexe pour aller plus vite sur les pentes, et avec Léa* parce qu'elle était suicidaire en raison de la séparation de ses parents.

C'est ce que Nancy a raconté, hier après-midi, alors qu'elle témoignait par vidéoconférence au procès de Bertrand Charest. La femme de 37 ans est la cinquième ex-athlète à venir témoigner contre son ancien entraîneur de ski, Bertrand Charest. L'homme de 52 ans est jugé sous 57 accusations de nature sexuelle, alors qu'il était en position d'autorité. Les plaignantes, toutes des skieuses, avaient entre 12 et 19 ans au moment des faits qui seraient survenus entre 1991 et 1998, soit jusqu'à ce que M. Charest soit contraint de démissionner comme entraîneur de l'équipe canadienne de ski, en raison des allégations.

Pour sa part, Nancy avait 19 ans quand elle a eu sa première relation sexuelle avec M. Charest, à l'automne 1997. Avant une course, elle est allée dans la salle de bains et a verrouillé la porte. M. Charest est venu, a frappé à la porte. Elle a ouvert, il l'a embrassée et ils ont eu une relation sexuelle. Ils en ont eu d'autres ailleurs, en Autriche et en France, lors de camps d'entraînement ou de compétitions. Il pouvait aussi l'embrasser dans le télésiège. Selon Nancy, M. Charest aimait le risque de se faire prendre.

Comme les autres témoins avant elle, Nancy a présenté M. Charest comme un habile manipulateur, qui jouait avec les émotions des filles. Il pouvait passer des commentaires déplaisants qui les faisaient se sentir « pas bonnes », les délaisser, les menacer de ne plus les entraîner, pour ensuite revenir et se montrer gentil. Malgré tout, c'était un excellent entraîneur, et les filles se battaient (au figuré) pour avoir son attention.

Ses agissements avec les filles n'étaient pas ceux d'un entraîneur normal, affirme Nancy. Il y avait des règles à respecter pour les entraîneurs, mais M. Charest les a toutes brisées.

DES LETTRES

En contre-interrogatoire, l'avocat de l'accusé, Me Antonio Cabral, a exhibé trois lettres que Nancy a envoyées à M. Charest, et dans lesquelles elle le remercie, lui dit toute son admiration ou s'excuse de lui avoir fait du mal... « Tu es ce dont le Canada a besoin, un vent d'air frais. Tu es admiré et respecté par tout le monde dans cette organisation... On a juste un an de fait ensemble et regarde ce qui a été accompli. Imagine comment ce sera dans cinq ans... Je suis chanceuse de t'avoir dans ma vie... Je suis tombée en amour avec toi, je sais que je ne suis pas ton grand amour, mais je serai toujours reconnaissante que tu aies pris soin de moi. » Nancy ne pouvait dire avec précision quand ces lettres avaient été écrites, ni trop dans quel contexte.

Le procès se poursuit aujourd'hui, pour une quatrième journée.

* Noms fictifs