Le procès pour fraude dans le dossier immobilier Faubourg Contrecoeur est long et complexe, mais n'il n'y a eu aucun délai déraisonnable justifiant l'arrêt des procédures, a tranché mercredi après-midi la Cour du Québec. Ainsi, la requête de six coaccusés a été rejetée et le procès se poursuivra en janvier prochain.

L'ex-président du comité exécutif de la Ville de Montréal, Frank Zampino, l'entrepreneur Paolo Catania et quatre employés de Construction Frank Catania (André Fortin, Pascale Fedele, Martin D'Aoust et Patrice Pascale) avaient invoqué l'arrêt Jordan. Cette décision de la Cour suprême du Canada établit qu'entre le moment de l'inculpation et la conclusion du procès, il ne doit pas se dérouler plus de 30 mois pour une cause entendue par une cour provinciale.

Dans le dossier du Faubourg Contrecoeur, les accusations ont été portées en mai 2012 et selon le calendrier fixé, le procès devrait se poursuivre jusqu'en juin 2017. Total: 61 mois.

Dans sa décision, le juge Yvan Poulin a souligné que 20 mois de retard étaient toutefois attribuables aux avocats de la défense notamment à cause du «recours délibéré à une tactique visant à causer un délai, les demandes frivoles, les délais de fixation de dates lorsque la défense n'est pas prête». Depuis l'ouverture du procès en février dernier, le Tribunal a principalement consacré son temps à gérer des requêtes dont certaines ont été annoncées pendant des mois sans jamais être produites, a souligné le juge Poulin. L'avocate de M. Zampino, Me Isabel Schurman, est particulièrement visée par ce dernier élément.

Pour ce qui est du travail de la poursuite, il a été jugé sans faille notable. «La poursuite a pris des mesures pour faire progresser cette affaire rapidement et a plusieurs fois insisté pour fixer une date de procès», écrit le juge Poulin.

Par ailleurs, des circonstances exceptionnelles ont également affecté le déroulement du procès. L'un des accusés, Bernard Trépanier, est atteint d'un cancer. L'état de santé de M. Trépanier a été connu au compte-goutte, a souligné le juge qui a rappelé que la situation l'a forcé à convoquer l'oncologue qui soigne l'accusé. Il a ainsi été ordonné que M. Trépanier, alias Monsieur 3%, subisse un procès séparé.

Même en soustrayant les 20 mois de la défense, le Tribunal estime que la complexité du dossier justifie donc la durée.

À sa sortie du tribunal, l'un des avocats de la défense, Me Pierre Morneau, n'était pas surpris de la décision rendue par la Cour du Québec. «Il y a beaucoup de gens qui font ce genre de requête dans le moment et il faut le faire.[...] Jordan a changé le portrait», a affirmé Me Morneau.

De son côté, Me Pascal Lescarbeau représentant la poursuite, s'est dit satisfait du jugement.

Les parties se retrouveront devant le Tribunal le 23 janvier -une semaine plus tard que prévu- pour la poursuite du procès. Jusqu'à maintenant, aucun témoin n'a été entendu dans cette cause.

Rappelons qu'à l'origine, il y avait 10 accusés, soit 9 individus et 1 entreprise. Un des accusés, Martial Fillion est décédé. Un autre, l'urbaniste Daniel Gauthier, a plaidé coupable et M. Trépanier subit un procès séparé.

Faubourg Contrecoeur est le nom donné au développement immobilier d'un vaste terrain dans l'est de Montréal. Le terrain municipal a été vendu à prix réduit au constructeur Catania qui aurait été choisi avant même la tenue d'un appel d'offres public. Les crimes auraient été commis en 2006-2007. La Presse a révélé le scandale en 2008. Quatre années d'enquête ont été nécessaires pour aboutir aux accusations de fraude, complot et abus de confiance.