Hugo Tremblay a tenté à au moins trois reprises au printemps 2013 d'amener son ex-patron, Michael Applebaum, à avouer qu'il avait obtenu des pots de vin, quand il était maire d'arrondissement. Mais celui qui était maintenant rendu maire par intérim de Montréal se montrait extrêmement méfiant.

«C'est un homme intelligent, il était méfiant. C'était la loi du silence, il ne parlait pas fort», a commenté M. Tremblay, mardi, alors qu'il témoignait au procès pour corruption et abus de confiance de M. Applebaum. Le ministère public lui reproche d'avoir obtenu des pots de vin en argent de la part de promoteurs qui voulaient faire affaire dans l'arrondissement Côte-des-Neiges/Notre-Dame de Grâce, qu'il dirigeait. Les faits reprochés se seraient produits entre janvier 2006 et le 31 décembre 2011. M. Tremblay a été attaché politique de M. Applebaum de décembre 2006 à juin 2012. Il était «son bras droit», et affirme avoir été initié au financement illégal et aux pots de vin par M. Applebaum.

Visite surprise 

Les policiers de l'UPAC sont allés trouver M. Tremblay en novembre 2012, alors qu'il ne travaillait plus pour la Ville. Ils le questionnaient sur la corruption. M. Tremblay n'a pas parlé, mais se sentait pris au piège. Selon son récit, les policiers sont retournés le voir en mars. Il a craqué, a vidé son sac, et a fini par accepter de collaborer avec la police pour piéger M. Applebaum et l'amener à admettre son implication.

Équipé de micros, M. Tremblay a rencontré M. Applebaum seul à seul à trois reprises, en mai 2013, dans une voiture, et une fois chez M. Applebaum. Il lui a aussi parlé au téléphone, alors que celui-ci était sous écoute. Il a tenté de la faire parler, sans grand succès, selon les enregistrements qui ont été diffusés mardi. M. Applebaum se montrait intéressé, mais ne s'est jamais compromis.

«Ils (les policiers) font ça avec tout le monde, avec tous les élus..., a-t-il dit en voulant rassurer M. Tremblay. 

À un autre moment, il se montrait étonné, surpris, quand M. Tremblay lui disait qu'il allait parler à la police sur leurs petites combines. 

«Je ne comprends pas de quoi tu parles... Quoi, vous avez reçu de l'argent... Si vous avez fait quelque chose d'illégal... Je ne sais ce que vous avez fait là», s'est exclamé M. Applebaum!

L'ex-maire de Montréal parlait parfois d'une voix très haute perchée, une voix inhabituelle. M. Tremblay l'interprétait comme le fait qu'il était contrarié, «tanné qu'on parle de ça.»

Le 3 mai 2013, M. Tremblay a rencontré M. Applebaum dans le sous-sol de ce dernier pour discuter du fait que les policiers le taraudaient. En s'assoyant sur le sofa, M. Applebaum a fait une chose qu'il n'avait jamais faite : il lui a tapoté le dos, comme pour vérifier s'il avait des micros. Par signe, M. Applebaum a signalé qu'il avait sorti l'argent de sa maison.

L'avocat de la défense Pierre Teasdale amorcera son contre-interrogatoire du témoin cet après-midi.