L'amnésie soudaine de Richard Bain quant à l'attaque du Métropolis est « hautement suspecte », selon le psychiatre appelé hier à la barre par la Couronne, qui croit que l'homme était en mesure de comprendre ses gestes le soir fatidique.

Le Dr Joel Watts a ajouté que la volonté de l'accusé de mettre en avant des symptômes qu'il associe lui-même à une surdose d'antidépresseurs soulève aussi des questions quant à la possibilité qu'il simule une partie de ses troubles afin d'éviter les conséquences de ses gestes.

Le psychiatre a commencé hier son témoignage devant le juge Guy Cournoyer et les 12 membres du jury qui doivent déterminer dans quel état d'esprit se trouvait Richard Bain le soir où il a attaqué le rassemblement péquiste de la victoire, le 4 septembre 2012. Il y a tué le technicien de scène Denis Blanchette et a gravement blessé son collègue Dave Courage.

« La perte de mémoire soudaine et complète rapportée par M. Bain pour la période où s'est produit le crime présumé n'est appuyée par aucune explication psychologique ou médicale », a-t-il écrit. « M. Bain a aussi plusieurs fois mis en avant de façon non sollicitée qu'il avait eu une surdose de Cymbalta [un antidépresseur] et suggérait que cela réduisait [ou annulait] la responsabilité de ses actes. »

« Je suis d'avis, avec un niveau de certitude raisonnable », que M. Bain était « en mesure d'apprécier la nature de ses actes » et « savait que ses actes étaient mauvais [wrong] » le soir des événements, a écrit Joel Watts dans son rapport présenté hier à la Cour. Il s'agit des deux critères prévus par le Code criminel afin de déterminer si un individu doit être tenu criminellement responsable de ses actes.

Distinguer le bien du mal

En matinée, la Dre Marie-Frédérique Allard - dont les services ont été retenus par la défense - a terminé son témoignage qui durait depuis plus d'une semaine. La psychiatre estime que M. Bain comprenait la nature des gestes qu'il posait, mais que sa psychose l'empêchait d'appliquer sa compréhension des concepts de bien et de mal.

Au contraire, a fait valoir Joel Watts : « M. Bain n'était pas dans un état maniaque, dépressif ou psychotique au moment de la commission des crimes présumés, le 4 septembre 2012 », a-t-il écrit.

« Même s'il les prenait trop à coeur, [ses opinions politiques] ne sont pas plus intenses ou intensément ressenties par M. Bain que chez d'autres individus avec une vision politique extrémiste qui ne souffrent pas de psychose. »

Il continue : « Il est plus probable que M. Bain ait été mécontent des résultats des élections provinciales [et d'avoir été incapable de voter] et des effets imaginés de ce résultat sur son commerce de pêche [un refus du gouvernement de lui accorder des droits de pourvoirie], ce qui a créé en lui de la colère et une manifestation physique de cette colère. Cette colère n'était pas le résultat d'un état psychotique. »

Selon lui, le fait que Bain ait camouflé son apparence avec un masque et ait retiré la plaque d'immatriculation de son auto suggère qu'il voulait éviter d'être identifié pendant qu'il commettait un acte qu'il savait incorrect.