Le jeune Montréalais de 15 ans accusé de crimes liés au terrorisme est une «victime de propagande nauséabonde et haineuse d'une idéologie morticide».

Si l'adolescent était parti combattre en Syrie, il aurait dû être considéré comme un enfant soldat, et non, comme un terroriste.

C'est du moins la position de la défense exprimée ce mercredi au moment de sa plaidoirie au procès de l'adolescent de 16 ans (15 ans lors des crimes allégués) en Chambre de la jeunesse de la Cour du Québec à Montréal.

Le salafisme djihadiste est une «idéologie nauséabonde qui vise des enfants vulnérables à la recherche d'une identité», a insisté l'avocat de l'adolescent, Me Tiago Murias.

La défense admet que l'accusé a «une opinion orthodoxe de l'islam» ; des «positions indéfendables dans une société libre et démocratique». Or, «l'adolescent peut penser que tout le monde ici est un apostat, ce n'est pas un crime», a plaidé Me Murias. 

«Ses positions politiques, c'est une chose. Les infractions qu'on lui reproche, ç'en est une autre», a martelé le jeune avocat.

La défense a comparé l'accusé à un «enfant soldat» impliqué dans un conflit armé. Or, selon les traités internationaux de l'ONU sur la question, l'enfant soldat, même volontaire, est une victime et ne peut être accusé de crime de guerre, a fait valoir l'avocat de défense.  

«Personne ne va considérer un enfant soldat africain, au Congo par exemple, comme un terroriste. (...) Que ce soit en Syrie ou au Congo, on parle d'enfants recrutés par des groupes armés dans un conflit armé. Pourquoi n'auraient-ils pas droit à la même protection ?», a demandé Me Murias. 

Aux yeux de la défense, mis à part les «inquiétudes légitimes» des parents et de la propagande «accessible à tous sur Internet» téléchargée dans son ordinateur, la poursuite ne détient aucune preuve que l'accusé voulait aller faire le djihad en Syrie.

«Son intention est d'aider le peuple syrien à se débarrasser du régime de Bachar Al-Assad. (...) Ce qui intéresse vraiment l'adolescent, c'est la souffrance des musulmans», a expliqué son avocat. L'adolescent avait la conviction que c'était son devoir de musulman d'aller «aider» en Syrie, a affirmé l'avocat de défense. 

Vrai que l'adolescent a commis un vol qualifié, mais rien ne prouve qu'il l'ait commis au profit d'une organisation terroriste, selon son avocat. 

Rappelons que le 11 octobre 2014, l'ado a volé un dépanneur à la pointe du couteau. Interrogé par la police, l'accusé a ensuite qualifié le fruit de son vol de «butin de guerre», puisque le Canada «massacre ses frères et ses soeurs (musulmans) en Afghanistan et en Irak. Plus tôt cette année-là, l'ado a aussi tenté d'acheter un billet d'avion "-aller simple» vers la Turquie, mais la banque a bloqué la transaction.

L'adolescent, dont l'identité est frappée d'un interdit de publication, est soupçonné d'avoir commis un vol qualifié «au profit ou sous la direction» d'une organisation terroriste en plus d'avoir voulu quitter le Canada pour participer «aux activités d'un groupe terroriste à l'étranger», soit l'État islamique.

L'adolescent avait des «fréquentations peu recommandables». Il connaissait l'auteur de l'attentat de Saint-Jean-sur-Richelieu, Martin Couture-Rouleau, a admis la défense. «L'adolescent partage une certaine vision avec M. Couture-Rouleau, mais la preuve s'arrête là, a dit Me Murias. L'accusé ne savait pas ce que Couture-Rouleau avait l'intention de faire (le 20 octobre 2014).» 

La défense poursuivra sa plaidoirie cet après-midi.

Hier, la poursuite a plaidé pour sa part qu'il ne faisait aucun doute que l'adolescent voulait s'envoler vers la Syrie pour aller combattre aux côtés de l'État islamique. Le procès se déroule devant la juge Dominique Wilhelmy.