L'ancien avocat de Stephen Harper a déclaré en cour, vendredi, qu'il n'avait pas été mis au courant d'une grande partie des négociations entre le sénateur Mike Duffy et le Cabinet du premier ministre, mais qu'il pensait que M. Harper avait lui-même approuvé la transaction.

Lorsque l'ancien chef de cabinet Nigel Wright lui a dit le fameux «on a le feu vert du premier ministre» («we're good to go from the PM»), Benjamin Perrin a affirmé avoir compris que M. Harper avait vu et approuvé en 2013 le plan en cinq étapes pour permettre à M. Duffy de rembourser ses dépenses.

Ces mots ont été envoyés par M. Wright dans un courriel en 2013, après que lui, Me Perrin et d'autres eurent conclu un accord avec Mike Duffy et ses avocats. Cette entente prévoyait notamment que M. Duffy avouerait publiquement avoir commis des erreurs avec ses dépenses et affirmerait qu'elles seraient remboursées.

Une partie de l'arrangement prévoyait que le parti couvrirait ces dépenses, que l'on croyait alors de 32 000$.

Selon Me Perrin, l'avocat de Mike Duffy a brièvement insisté pour que l'entente comprenne une promesse en vertu de laquelle les conservateurs ne demanderaient jamais à la Gendarmerie royale du Canada d'examiner les dépenses du sénateur. Le Cabinet du premier ministre a cependant jugé cette proposition inacceptable.

Me Perrin a précisé que même si personne, à ce moment, ne croyait le sénateur Duffy coupable d'un crime, l'équipe du premier ministre ne pouvait s'engager - ni légalement ni politiquement - à ne jamais confier le dossier à la police.

Plus tôt cette semaine, Nigel Wright a déclaré en cour que ce commentaire («on a le feu vert») référait à une conversation qu'il avait eue avec le premier ministre, lors de laquelle il lui avait dit qu'il demanderait à Mike Duffy de rembourser. Il n'a pas donné de détails. En campagne électorale, M. Harper a affirmé n'avoir jamais dit cela.

Me Perrin a également dit au tribunal qu'il n'avait jamais parlé directement à M. Harper à propos de ce dossier et qu'il ignorait tout des négociations. S'il avait pensé que tout élément du plan était illégal, il en aurait parlé, a-t-il assuré.

Benjamin Perrin en était à sa deuxième journée de témoignage au procès de Mike Duffy pour 31 chefs d'accusation, dont fraude, abus de confiance et corruption. Son témoignage était principalement lié à ces deux dernières accusations qui découlent du chèque de 90 000 $ que le sénateur a accepté de Nigel Wright.

Cette somme correspond au montant des dépenses indûment réclamées par le sénateur, et une partie du travail de Me Perrin était de découvrir pourquoi M. Duffy refusait de les rembourser, a-t-il indiqué. Selon lui, Nigel Wright lui a clairement dit que M. Duffy paierait, puisqu'il allait lui-même signer le chèque.

Les déclarations de l'avocat ont eu l'effet d'une bombe dans la campagne conservatrice, jeudi, alors qu'il a affirmé que le chef de cabinet du premier ministre, Ray Novak, connaissait très bien l'existence du remboursement des 90 000$ par Nigel Wright, ce que le clan Harper avait toujours nié.

Il a également affirmé qu'avec le recul, il avait constaté qu'il n'était pas en possession de toute l'information disponible lorsqu'il a fait son travail et a laissé entendre qu'il était heureux d'avoir déjà décidé de quitter son emploi lorsque les négociations entre Mike Duffy et le Cabinet du premier ministre au sujet du remboursement ont tiré à leur fin.

«Je me suis retrouvé dans une position très inconfortable et je n'aimais pas ça, a-t-il déclaré. Les avocats travaillent pour toutes sortes de gens.»

Le procès reprendra lundi pour une semaine, avant d'être ajourné à une date ultérieure au scrutin du 19 octobre.