L'ex-député conservateur ontarien Dean Del Mastro, qui répondait au nom du premier ministre Harper, en Chambre, lorsqu'il était question de présumées fraudes électorales, a été condamné jeudi à un mois de prison pour avoir «triché» durant la campagne de 2008.

Une juge de la Cour supérieure de l'Ontario a déterminé que l'ex-député de Peterborough avait délibérément dépassé le montant maximal de dépenses autorisé par la loi électorale, qu'il avait omis de déclarer une contribution personnelle de 21 000 $ à sa propre campagne, et qu'il avait sciemment remis un document falsifié.

La juge Lisa Cameron a expliqué que M. Del Mastro avait non seulement triché, mais qu'il avait ensuite tenté de camoufler ses crimes, et que sa conduite constitue un affront aux principes mêmes de la démocratie canadienne. Elle estime donc que même s'il s'agit d'une première offense, une peine de prison est appropriée dans les circonstances.

«L'emprisonnement est requis par souci de dissuasion et pour promouvoir la dénonciation», a indiqué la juge Cameron.

Les deux peines d'un mois de prison pour les deux premières offenses sont concurrentes, tandis que la falsification de documents lui vaut une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis - il sera quand même assigné à résidence pendant ces quatre mois, après son séjour d'un mois en prison. La juge Cameron a par ailleurs imposé à M. Del Mastro une période de probation de 18 mois et une période d'inéligibilité de cinq ans. Il devra enfin verser 10 000 $ à l'Association de circonscription de Peterborough.

Son avocat, qui a vainement tenté d'obtenir que M. Del Mastro puisse purger sa peine de façon intermittente, a indiqué jeudi qu'il fera appel de la condamnation, et qu'il demandera vendredi la libération sous caution de son client en attendant la suite des procédures.

M. Del Mastro maintient qu'il est innocent et que le verdict de la juge, rendu l'automne dernier, ne représente que son opinion à elle. Lors d'une audience pour la détermination de la peine, en avril, il se disait, en larmes, victime de l'«opprobre nationale» depuis le dépôt des accusations. La juge Cameron a d'ailleurs indiqué qu'en déterminant la peine, elle avait tenu compte de l'impact de la médiatisation de cette affaire sur M. Del Mastro et sa famille.

La Couronne demandait jusqu'à 12 mois de prison, alors que la défense espérait une absolution conditionnelle ou, au pire, une amende.

Dean Del Mastro avait siégé comme député indépendant après le dépôt des accusations, et a démissionné après sa condamnation.

Interrogé par les journalistes à Québec, jeudi, le lieutenant du premier ministre Stephen Harper au Québec, Denis Lebel, a prudemment indiqué que «toute personne qui enfreint les règles au Canada doit payer le prix, peu importe le secteur d'activités».

«Ça aurait pu être quelqu'un de n'importe quel parti; à ce moment-ci, c'est M. Del Mastro», a-t-il dit.

Interrogé sur les impacts négatifs que pourrait avoir une telle condamnation sur les conservateurs, à la veille d'une campagne électorale, le ministre Lebel s'est montré optimiste. «M. Harper démontre, depuis qu'il est premier ministre du pays, la rigueur, l'engagement, le respect de sa parole (...) Je pense que les Canadiens font la part des choses entre un individu et un parti politique.»

Le comptable de M. Del Mastro, Richard McCarthy, qui était l'agent officiel du député, a par ailleurs été condamné à une peine de deux mois avec sursis et d'un an de probation pour le rôle qu'il a joué dans cette affaire. Selon la juge, M. McCarthy, âgé de 68 ans, a fait preuve au mieux d'un aveuglement volontaire, au pire d'un consentement tacite face aux manigances du député, mais sa responsabilité est beaucoup moins grande.