Ç'a commencé par des cadeaux et des invitations de son collègue Gordon MacDougall - qu'elle refusait. L'homme, journaliste à Radio Canada International, s'est montré plus insistant. C'est devenu du harcèlement. Intense, et de plus en plus inquiétant.

« J'étais complètement terrorisée, j'ai basculé dans la dépression profonde », a raconté hier Mme Z, en Cour du Québec, dans le cadre des plaidoiries sur la peine à imposer à M. MacDougall. L'homme de 68 ans a plaidé coupable à une accusation de harcèlement criminel envers Mme Z, annonceure et réalisatrice à Radio Canada International. Le harcèlement s'est produit entre l'automne 2009 et mai 2012. M. MacDougall, qui était chef de pupitre et représentant syndical, a été congédié dans la foulée de cette affaire, le 28 mai 2012.

Selon Mme Z, M. MacDougall l'épiait, la suivait - même jusque chez elle une fois - , lui laissait des notes, l'appelait à la maison, ou arrivait par-derrière pour la surprendre et lui dire des choses comme : « Ah, tu te caches ! »

« Il était mon représentant syndical. Il m'a harcelée pendant trois ans. Tous les jours. Il était 30 fois par jour devant mon bureau. Il me suivait, me coinçait. Je n'étais plus capable de travailler, de me concentrer. À la fin, c'était rendu à un niveau extrême. J'ai eu très peur », a confié Mme Z, qui assure ne jamais avoir donné de signe d'intérêt à M. MacDougall.

« Du tout début, quand il a montré un intérêt, je l'ai refusé tout de suite. Clac ! Clairement. Nous avions une relation de travail, rien de plus. Je ne suis même jamais allée prendre un café avec » lui, a-t-elle dit.

Dissuader

Mme Z affirme avoir tenté de dissuader M. MacDougall d'agir ainsi. Elle affirme lui avoir crié « d'arrêter », et elle lui a envoyé une lettre recommandée, en 2010, l'enjoignant à cesser, sans quoi elle porterait plainte à la police. En 2011, M. MacDougall avait été averti à deux reprises par son employeur de cesser de déranger sa collègue. Mais cela n'a pas suffi.

Au printemps 2012, Mme Z s'est mise à trouver des substances gluantes sur son téléphone, au bureau. Au début du mois de mai, elle a installé une caméra cachée dans son bureau. C'est ainsi que M. MacDougall s'est fait prendre la main dans le sac. C'est sur la foi de cet enregistrement qu'il a été congédié.

Affligée

Mme Z a été en arrêt de travail pendant sept mois, à partir du 20 juin 2012. « La CSST a reconnu qu'il s'agissait d'un accident de travail », a fait valoir Mme Z devant le juge Jean-Pierre Boyer.

« J'avais travaillé fort pour arriver où j'étais avant son acte criminel, a ajouté Mme Z, avec émotion. Il s'est emparé de ma confiance envers les autres. Avec son acte criminel, il a brisé ma joie de travailler. »

Mme Z a pris des médicaments pendant deux ans et a consulté un psychologue. Elle en est affligée. D'origine chinoise, elle dit que la dépression est très mal vue dans sa communauté.

« C'est la souffrance et la timidité. Dans la culture chinoise, toutes ces affaires de harcèlement, c'est mal vu. »

Hier, Mme Z était accompagnée de son conjoint, cadre retraité en ressources humaines, qui la soutient.

Me Éric Sutton, qui représente l'accusé, aspire à obtenir une absolution pour son client. La procureure de la Couronne, Audrey Simard, demandera une peine avec sursis.

Les plaidoiries sur la peine se poursuivront le 14 janvier.