Le procès de l'homme au coeur du scandale du Sénat, Mike Duffy, s'est brièvement ouvert mardi et l'avocat du sénateur en disgrâce n'exclut pas d'appeler Stephen Harper en personne à la barre des témoins.

Donald Bayne a fait une brève apparition au palais de justice d'Ottawa, sans son célèbre client. Il a convenu avec l'avocat de la couronne de revenir en cour mardi prochain pour fixer la date du procès.

Bien qu'il martèle qu'il s'agisse d'une « cause criminelle, pas une cause politique », l'avocat n'a pas exclu d'appeler le premier ministre conservateur à témoigner.

« Nous considérons tout témoin potentiel à ce stade-ci, a dit M. Bayne à sa sortie du tribunal. Il est trop tôt pour exclure qui que ce soit. Mais s'il vous plaît, comprenez que cette cause n'est pas menée comme une vendetta personnelle ou politique. »

L'affaire a promptement rebondi à la Chambre des communes, où l'opposition a pressé M. Harper de ne pas se défiler.

« Le premier ministre n'a toujours pas expliqué ce qu'il savait au juste sur le personnel, a dit le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair. S'il est appelé à témoigner dans l'affaire de son sénateur Mike Duffy, est-ce que le premier ministre va essayer de se cacher derrière son privilège parlementaire ou va-t-il témoigner? »

« Si nous lisons le rapport des enquêteurs, il n'y a absolument aucune raison de croire que je ferais cela », a répondu M. Harper.

Il faisait référence à des documents produits en cour selon lesquels le premier ministre n'aurait pas été mis au courant des agissements de M. Duffy et de son chef de cabinet, Nigel Wright.

M. Harper a nommé Mike Duffy à la Chambre haute en 2009. Mais les dépenses somptuaires de l'ancien animateur de télévision - comme celles des sénateurs conservateurs Patrick Brazeau et Pamela Wallin - ont provoqué le plus gros scandale à ébranler le gouvernement conservateur.

Cet été, la Gendarmerie Royale du Canada a déposé 31 chefs d'accusation contre M. Duffy en lien avec son usage des fonds publics. On lui reproche des réclamations frauduleuses pour des frais de logement, de déplacement et pour un contrat de consultation.

M. Duffy est également accusé de corruption d'un fonctionnaire, de fraude et d'abus de confiance pour avoir accepté un chèque personnel de 90 000$ de Nigel Wright. Cette somme devait lui permettre de rembourser ses réclamations indues au Sénat.

Bien que M. Wright ne soit pas accusé dans cette affaire, ces derniers chefs d'accusations sont potentiellement explosifs pour le premier ministre conservateur, puisqu'ils impliquent directement son entourage. 

Un procès bientôt ?

M. Duffy souhaite que son procès survienne au plus vite, a dit M. Bayne. Cet empressement s'explique en partie par l'état de santé de l'ancienne vedette de la télévision, qui a subi deux chirurgies à coeur ouvert.

« Nous allons fixer la date du procès le plus tôt possible, a-t-il dit. Vous vous rappellerez que, pour le sénateur, ce sera la première opportunité de ventiler toute la preuve devant un tribunal impartial et de blanchir sa réputation. »

Si M. Duffy renonce à son enquête préliminaire, les procédures pourraient avoir lieu dès l'an prochain, en pleine année électorale. Il s'agirait d'une situation délicate pour Stephen Harper, qui briguera alors un quatrième mandat.