Karine Major était dans un état « d'extrême détresse » psychologique pendant sa fuite de huit jours jusqu'en Saskatchewan, où elle a été volée par deux hommes qui l'ont « gardée contre son gré ». C'est pourquoi la jeune chimiste de Rimouski ne devrait pas faire l'objet d'accusations criminelles pour méfaits publics, malgré son faux témoignage aux policiers, ont plaidé ses proches samedi après-midi.

« Ce qui est certain, c'est que Karine n'était pas elle-même, elle est en détresse psychologique et va avoir besoin d'aide. Il y a eu un événement majeur dans sa vie, et elle a perdu pied. Son équilibre a basculé avec les conséquences que vous connaissez », a affirmé sa soeur Annie Major, lors d'une conférence de presse organisée à Montréal par l'Association des familles de personnes assassinées ou disparues (AFPAD).

« Ce que le monde ignore par contre, c'est qu'il y a seulement une grande détresse psychologique qui pouvait conduire Karine à quitter et à laisser sa vie et ses proches derrière elle », a ajouté son conjoint Alexandre Livernoche.

Karine Major n'a toutefois aucun trouble mental, a spécifié le procureur au dossier, Me Jean Denis. « On va lui faire consulter des personnes au niveau de la santé publique pour voir son état psychologique », a-t-il indiqué, ajoutant que l'événement déclencheur de sa cavale était lié à sa « vie sociale », et non pas à sa famille.

La disparition de Karine Major, le 9 mai dernier, a provoqué un branle-bas partout au Québec. La femme de 26 ans a finalement donné signe de vie le 17 mai en téléphonant à sa grande soeur Annie depuis la Saskatchewan. La Sûreté du Québec reproche à Karine Major d'avoir menti aux enquêteurs, notamment en déclarant avoir été victime d'enlèvement, avant de se rétracter.

Aucune accusation n'a encore été portée contre elle, a martelé Me Denis. « Il faut comprendre qu'elle ne dormait pas, qu'elle ne mangeait pas, qu'elle était dans un état de confusion. [...] Elle a fait peut-être une déclaration qu'elle n'aurait pas dû faire. Ce n'est pas de façon volontaire qu'elle a voulu tromper qui que ce soit », a-t-il expliqué.

« Effectivement, elle a fait un faux témoignage à la GRC lorsqu'ils l'ont interrogée. Est-ce que c'était par confusion ? Est-ce que c'est parce qu'elle voulait garder la raison pour laquelle elle était rendue en Saskatchewan pour elle-même, ça je n'en ai aucune idée », a admis son conjoint.

Annie Major prie le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de ne pas déposer d'accusations de méfaits contre sa soeur. « C'est quelqu'un qui n'allait pas bien, qui était en détresse. On demande de la compréhension de son état », a-t-elle plaidé. Selon ses proches, Karine Major n'était pas consciente que le Québec entier remuait ciel et terre pour la retrouver. Elle n'avait d'ailleurs pas apporté son téléphone.

Karine Major a abandonné sa voiture au Manitoba pour se rendre à pied jusqu'en Saskatchewan, a raconté Alexandre Livernoche. C'est à ce moment-là que la situation a dérapé pour la jeune femme. Alors qu'elle faisait du pouce, elle a été volée par deux hommes qui l'avaient embarquée dans leur véhicule, selon M. Livernoche.

« Ils lui ont pris ce qu'elle avait sur elle et elle a réussi à se sauver en forêt pour se rendre dans une ville et nous appeler. [...] Elle était paniquée, elle venait de se sauver de gens qui l'ont possiblement maltraitée, on ne le sait pas, et qui l'ont retenue dans leur voiture », a-t-il ajouté, sans toutefois parler d'enlèvement.

La famille de Karine Major demande maintenant un peu de quiétude pour la jeune femme, encore ébranlée par cette mésaventure. « Karine n'aime pas être exposée publiquement. Elle est réservée et discrète. Elle va avoir besoin de votre empathie et de votre compassion, et surtout de votre respect, pour reprendre tranquillement sa vie en main », a dit sa soeur Annie Major.

Malgré toute l'inquiétude qu'elle lui a fait vivre, Annie Major n'en veut absolument pas à sa soeur. « Il n'y a une aucune rancune, aucune rancoeur, rien, rien. L'important, c'est qu'elle soit avec nous, le reste c'est tellement accessoire. »