Une rencontre au sommet en Colombie avec des narcotrafiquants et un Montréalais, une cargaison de 1200 kg de cocaïne, un complot bien rodé pour transporter la drogue de l'Amérique du Sud jusqu'en banlieue de Montréal : un Colombien a reconnu, vendredi, avoir participé à l'un des plus importants complots d'importation de cocaïne des dernières années au Canada.

Tempes grisonnantes, petite stature, Ivan Betancur Alzate n'est pas conforme à l'image populaire du narcotrafiquant colombien véhiculée par des séries télé comme Narcos. Néanmoins, le résidant de Cali, en Colombie, était prêt à importer au pays des quantités de drogue dignes des cartels : l'équivalent de dizaines, voire d'une centaine de millions de dollars de cocaïne d'une grande pureté.

Détenu au Québec depuis son extradition de la Colombie en juin 2016, le narcotrafiquant de 58 ans a évité la tenue d'un procès en plaidant coupable, vendredi au palais de justice de Montréal, à une accusation de complot pour importation de cocaïne dans le but d'en faire le trafic au Canada entre le 2 août 2014 et le 21 avril 2015.

Un exposé conjoint des faits déposé à la cour, vendredi, révèle les détails du complot déjoué par deux agents d'infiltration de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) dans le cadre de l'enquête Harrington. 

Ce coup de filet majeur de la GRC en avril 2015 a mené à l'arrestation d'une dizaine de personnes, dont plusieurs  ont été jugées à Montréal.

Les deux agents d'infiltration, dénommés « Joe » et « Dave », accompagnent le 14 avril 2015 le narcotrafiquant néo-écossais Gary Meister et le Montréalais Normand Pomerleau à Cartagena, une ville portuaire colombienne. Le quatuor rencontre Ivan Betancur Alzate et deux hommes non identifiés. Une rencontre enregistrée et filmée à l'insu de tous par les agents de la GRC.

Les deux camps conviennent d'un plan élaboré pour importer les 1200 kg de cocaïne de la Colombie au Canada. Première étape : utiliser le bateau de l'accusé spécifiquement modifié pour dissimuler de la cocaïne et pour naviguer à grande vitesse afin de transporter la drogue jusqu'au large de Terre-Neuve. Ensuite, transférer les paquets de 25 kg de cocaïne sur les bateaux de pêche de « Joe » et « Dave » et acheminer la drogue par camion à Normand Pomerleau en banlieue de Montréal. Notons que ce dernier doit subir son procès devant jury en janvier prochain.

MOTS DE CODE

Pour éviter d'attirer les soupçons des autorités, Ivan Betancur Alzate demande à ses complices d'utiliser des mots de code sur les ondes radio pour communiquer leur position. Il souhaite également élaborer un plan d'urgence en cas de maladie ou de manque de nourriture sur le bateau.

Visiblement à l'aise en français, puisqu'il a plaidé coupable dans cette langue vendredi, Ivan Betancur Alzate a servi d'interprète pendant la rencontre qui s'est déroulée en trois langues en Colombie, selon le document déposé.

Le Néo-Écossais Gary Meister a lui aussi plaidé coupable à une accusation d'importation de cocaïne en mai 2017 à Montréal. Il a écopé d'une peine de huit ans et demi de pénitencier. Son frère, Delbert William Meister, un ex-employé de la Garde côtière canadienne, a reçu une peine de deux ans de prison à domicile en avril dernier pour abus de confiance par un fonctionnaire public. Le septuagénaire a divulgué de l'information sur un navire du port d'Halifax dans le cadre d'un complot fictif d'importation de cocaïne.

Les observations sur la peine à imposer auront lieu le 28 septembre prochain. Le Colombien est défendu par Me Marion Burelle, alors que Me Samuel Monfette-Tessier représente la Couronne fédérale.

Photo Thinkstock

La ville de Cali, en Colombie