Un homme considéré par la police comme une relation des Hells Angels n'a pas le droit de mettre le pied dans l'île de Montréal jusqu'à nouvel ordre. Cette rare mesure a été imposée à Marc-André Lachance, 33 ans, libéré d'office le mois dernier, à de fortes conditions, après avoir purgé les deux tiers d'une peine de plus de cinq ans de pénitencier.

Lachance est cet individu qui avait violemment battu un enquêteur du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) qui les avait pris en photo, lui et d'autres personnes, en janvier 2011 dans un bar de Playa del Carmen, au Mexique. C'est d'ailleurs notamment parce que la victime est un policier dans la métropole que la Commission des libérations conditionnelles du Canada interdit à Lachance de franchir les ponts qui ceinturent l'île de Montréal.

«La Commission est d'avis que cette condition est proportionnelle à la gravité de vos délits et au risque de récidive. Elle ne peut présumer de l'endroit de travail de la victime dans le temps, dont l'employeur étend ses services à l'ensemble de l'île de Montréal», écrivent les commissaires dans leur décision de huit pages.

«Les conditions doivent toujours être nécessaires et en lien avec les facteurs contributifs. Si la Commission croit qu'un délinquant pourrait se trouver à tel endroit et que cela pourrait représenter des risques, une telle mesure peut donc être légitime. Toutefois, un délinquant peut en appeler de cette mesure», explique Me Sylvie Bordelais, spécialiste du droit carcéral et des libérations conditionnelles. La criminaliste a accepté, à la demande de La Presse, de commenter cette mesure de façon générale, et non pas ce cas précis. Une condition similaire a été imposée à l'un de ses clients dans le passé.

«La Commission demande de plus en plus aux victimes de se prononcer, alors il se peut qu'elle impose plus fréquemment une telle mesure», dit Me Bordelais.

«Une restriction géographique amène souvent les Services correctionnels à avoir recours au bracelet électronique pour suivre les délinquants sous le coup d'une telle mesure», ajoute la criminaliste.

Drogues et armes

Dix mois après l'épisode du policier battu au Mexique, Lachance avait été arrêté dans l'opération Carcan de la Sûreté du Québec contre trois cellules de trafic de stupéfiants liées aux Hells Angels. Les enquêteurs avaient retrouvé chez lui de la drogue, de l'argent, un poing américain, un couteau artisanal, un bâton télescopique, un gilet pare-balles et des munitions. Il avait été accusé de complot, de gangstérisme et de trafic de drogue, et condamné à sa peine actuelle.

Malgré ses déboires, Lachance est toujours considéré comme une relation des Hells Angels par les Services correctionnels. Il a continué de les côtoyer derrière les murs. Il a menacé un employé de la prison en 2012 et a eu une altercation physique avec un codétenu l'année suivante. Les commissaires notent toutefois que Lachance a un «comportement adéquat» avec le personnel, même s'il a été trouvé en possession de substances intoxicantes et d'un briquet, et qu'il a refusé de fournir un échantillon d'urine.

Criminalité cachée

Lachance a poursuivi ses études et a occupé un emploi au pénitencier. «Vous possédiez déjà de bonnes habiletés au travail avant votre incarcération et aviez les ressources nécessaires pour bien gagner votre vie», ajoutent les commissaires.

Toutefois, ceux-ci croient que Lachance, malgré un nombre d'antécédents limités, a une criminalité cachée. «Vous adhérez aux valeurs d'un groupe criminel et violent et votre propension à la violence ne fait aucun doute, tout comme votre absence d'empathie. Vous vous êtes très peu impliqué avec votre équipe de gestion de cas (EGC) et l'augmentation du risque, en lien avec la reprise de contacts dans votre milieu, serait très difficile à établir dans le cadre d'une surveillance régulière en communauté», affirme la Commission, qui lui impose d'autres conditions.

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Les autres conditions imposées à Marc-André Lachance 

• Demeurer dans une résidence approuvée par les Services correctionnels.

• Chercher et conserver un emploi.

• Éviter toute personne ayant des antécédents criminels ou étant liée à une organisation criminelle ou au trafic de drogue.

• Éviter les débits de boisson.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou à l'adresse postale de La Presse.