« On ne vit pas éternellement. Je veux vivre tranquillement le temps qu'il me reste. »

L'un des Hells Angels québécois les plus craints à une certaine époque, l'ancien Nomad Richard Mayrand, a convaincu hier la Commission des libérations conditionnelles du Canada de pouvoir quitter sa maison de transition pour aller vivre avec sa nouvelle femme. Mais l'audience, dirigée habilement par le commissaire Michel Lalonde, a surtout donné lieu à un témoignage comme on en voit rarement. L'ancien motard, condamné à 22 ans de pénitencier en 2004 pour complot pour meurtre, trafic de stupéfiants et gangstérisme, s'est ouvert avec une apparente authenticité.

Mayrand, 53 ans, a dit avoir quitté les Hells Angels en 2009 et même avoir recouvert ses tatouages. L'un des moments forts de l'audience est survenu lorsque le commissaire lui a reproché d'être toujours loyal envers l'organisation malgré qu'elle ait assassiné son frère, Michel, lors de la tuerie de Lennoxville en 1985. Visiblement secoué, Mayrand est demeuré quelques secondes pensif et silencieux, avant de déclarer ceci : 

« Je ne sais pas quoi vous répondre, monsieur. Mon frère avait brisé des règles. J'avais 20 ans, c'était une façon de penser, une façon différente de voir les choses. Je ne me voyais pas quitter le club, je venais d'arriver. Et même si j'avais quitté le club, mon frère n'était plus là, ça n'aurait rien changé. Tous mes amis étaient dans le club. Mais je l'aimais mon frère, je m'en ennuie encore. »

Photo archives La Presse

Richard Mayrand a été condamné à 22 ans de pénitencier en 2004 pour complot pour meurtre, trafic de stupéfiants et gangstérisme.

« Une agente de libération m'a déjà demandé dans le passé de parler contre le club, mais je lui ai dit que je ne le ferais pas. Ce n'est pas de la loyauté. C'est tout simplement parce que ce fut ma décision d'entrer dans le club et non celle des autres. Je n'ai pas à caler les autres pour me remonter. »

- Richard Mayrand

Mayrand a aussi expliqué son entrée chez les Hells Angels, au sein desquels il a passé 25 ans de sa vie, par le fait qu'il avait de la difficulté à l'école, qu'il a quittée à 12 ans. Il s'est mis à vendre de la drogue puis à faire de la moto. Culturiste et ancien Monsieur Canada, il a dit que c'est lui qui a fait connaître aux autres Nomads le Pro-Gym de Montréal, devant lequel les motards, dont l'ancien chef Maurice Boucher, ont souvent été filmés par les policiers durant l'enquête Printemps 2001.

« C'EST ASSEZ »

Depuis qu'il a été libéré d'office en décembre 2014, Mayrand peine à trouver un emploi. Il a réparé des chemins de fer, a été briqueteur et entraîneur à temps partiel dans un gym. Il est actuellement livreur-déménageur pour un organisme de bienfaisance. Il espère éventuellement retourner vivre dans sa ville natale, avec sa conjointe. Il ne veut plus être un criminel et promet de respecter ses conditions. La police de Montréal ne le considère pas comme un sujet d'intérêt, mais la SQ le garde à l'oeil.

« Cette vie, je n'en veux plus. J'ai des enfants et des petits-enfants. Mes enfants m'ont attendu durant 14 ans. C'est assez, c'est fini. On a de la bouffe dans le frigidaire, je n'ai pas besoin de plus que ça. »

« Un moment donné, je vendais de la drogue et je faisais beaucoup d'argent, ça venait tout seul. Aujourd'hui, je n'ai presque pas d'argent, mais je suis bien. Si je recommence, ce n'est pas 20 ans que je vais prendre, mais 30. On ne vit pas éternellement. Je veux vivre tranquillement le temps qu'il me reste », a-t-il déclaré.

Pour joindre Daniel Renaud en toute confidentialité, composez le 514 285-7000, poste 4918, ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.

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RICHARD MAYRAND EN BREF


• Surnommé Dick

• Membre fondateur et influent des défunts Nomads de Montréal

• Il était l'un des lieutenants de Maurice Boucher

• Il a été l'un de ceux qui ont conclu la paix avec les Rock Machine

• Arrêté dans l'opération Printemps 2001

• Condamné à 22 ans de pénitencier en 2004 pour complot pour meurtre, trafic de stupéfiants et gangstérisme

• Libéré d'office en décembre 2014

• Sa libération a été suspendue temporairement pour un non-respect de condition en février 2015