Si l'Unité permanente anticorruption (UPAC) a bon espoir d'avoir accès à la dépouille d'Arthur Porter dès aujourd'hui, les policiers québécois ont tout de même l'intention de la rapatrier au Québec pour pousser encore davantage les tests scientifiques d'identification, a appris La Presse.

Les autorités canadiennes veulent éliminer le moindre doute quant au fait que l'auteur présumé de ce qui a été qualifié devant la commission Charbonneau de «plus importante fraude de corruption de l'histoire du Canada» est bel est bien passé de vie à trépas, mardi soir, dans la chambre 21, au sixième étage de l'Institut oncologique national.

Selon les informations recueillies à Panama City, les autorités locales ont reçu dans les derniers jours une demande d'assistance de la part des Canadiens afin de rapatrier le corps d'Arthur Porter. L'objectif: permettre au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale du Québec d'en établir l'identité à 100%.

La demande sera traitée en vertu des accords internationaux de coopération en matière policière - un MLAT, dans le jargon de la police.

Les procédures de rapatriement pourraient toutefois prendre du temps, notamment si la famille s'y oppose. C'est un procureur panaméen qui plaidera la cause des policiers québécois. Les deux émissaires de l'UPAC ne demeureront pas au Panama pendant ces procédures.

La Presse n'a pas pu établir si la famille Porter contestera le rapatriement du corps au Canada. Un message envoyé à l'une de ses filles est demeuré sans réponse, hier.

Selon nos informations, le duo croit être en mesure de pénétrer derrière les portes cadenassées de la morgue judiciaire de Panama City aujourd'hui, afin d'avoir accès au corps, après trois jours à faire progresser les formalités administratives nécessaires dans la chaleur accablante du Panama.

Une fois dans l'édifice, ils devraient prélever un échantillon d'ADN, vérifier les empreintes digitales et, si possible, identifier visuellement la dépouille. Cette dernière étape pourrait toutefois s'avérer difficile en raison des effets du cancer dont Porter disait souffrir.

Débat autour de La Joya

Pendant ce temps, hier, les anciens alliés d'Arthur Porter continuaient à dénoncer le traitement de son dossier par le Canada et le Panama. Ils critiquent notamment les conditions de vie qui prévalent au centre de détention de La Joya, où Arthur Porter était incarcéré en attendant son extradition vers le Canada.

«Tout est mauvais», assure Angel Alvarez lorsqu'on lui demande de décrire les conditions de vie dans la superprison située en banlieue de la capitale. L'avocat panaméen, qui a participé au combat que menait Arthur Porter contre la demande d'extradition canadienne, a encore des clients qui s'y trouvent. Me Alvarez soulève notamment des problèmes sanitaires importants, en plus de l'omniprésence de déchets.

Jesse Foster, un camarade de prison de Porter qui se trouve toujours à La Joya, a dénoncé pour sa part le sort que les gouvernements occidentaux réservent à leurs ressortissants détenus au Panama.

Autre son de cloche du côté policier. Selon nos informations, les autorités canadiennes ont envoyé un policier de la GRC à La Joya dans les mois précédant le transfert de Porter à l'hôpital, avec pour objectif de documenter ses conditions de détention. Les policiers et procureurs de l'UPAC voulaient être capables de faire face à d'éventuelles demandes des avocats de Porter pour faire compter son temps de détention au Panama en double ou en triple advenant une éventuelle condamnation.

L'envoyé de la police fédérale aurait conclu que l'aile des détenus internationaux de La Joya n'offrait pas les mêmes conditions de vie que les prisons canadiennes, mais que la situation demeurait acceptable, toujours selon nos informations. Surtout, a souligné une source policière, que Porter pouvait abandonner à tout moment son combat contre l'extradition et être rapidement transféré dans une cellule au Canada.