Cela fait plus d'un an et demi qu'ils sont morts dans des circonstances horribles, à la suite de l'incendie criminel de leur immeuble du quartier Hochelaga-Maisonneuve. Ils ont possiblement été victimes d'une erreur sur la personne dans un conflit entre petits trafiquants de crack. C'est du moins la thèse privilégiée par la police pour expliquer le crime.

Dans la nuit du 15 novembre 2012, des truands ont versé de l'essence devant la porte du logement où habitaient Jeannine Léveillé et son frère Richard. Puis ils ont mis le feu.

La femme dans la cinquantaine, à la santé cardiaque précaire - que tous les gens du secteur appelaient «mamie» -, et son frère aîné, qui dormait dans une chaise longue près d'elle, ont été pris au piège et n'ont pas réussi à sortir de leur appartement du deuxième étage.

La mort violente, qui avait toutes les allures d'un règlement de comptes, de ces gens sans histoires a stupéfait le voisinage.

Et pour cause, parce que tout porte à croire qu'ils ont été victimes d'une erreur sur la personne. Le frère et la soeur auraient été victimes d'une guerre de territoire entre deux groupes concurrents de revendeurs de crack.

Le conflit aurait été ponctué d'autres incidents et aurait culminé avec cet incendie mortel. Le logement voisin de celui des défunts, dans le modeste immeuble situé à l'angle des rues Ontario Est et Joliette, était apparemment fréquenté par des consommateurs de crack.

«C'était une piquerie», affirme d'ailleurs Johanne Grenier, une des filles de Jeannine Léveillé.

Sa soeur Chantal et elle, comme leur tante Diane, ont hâte que des suspects soient identifiés et arrêtés par les enquêteurs afin de pouvoir entamer leur deuil.

«Ça me hante toutes les nuits. J'aimerais un jour pouvoir dormir sur mes deux oreilles. Mettre ça de côté et me dire qu'au moins, ceux qui ont fait ça sont punis. Je ne peux pas croire que ça va rester impuni. Ma mère avait beau ne pas être riche, ça reste que c'est un être humain», laisse tomber Chantal Grenier.

Sa soeur et elle habitent toutes deux à quelques centaines de mètres du logement où a péri leur mère. Elles ont accouru sur les lieux rapidement. Elles ont vu le feu sortir de la fenêtre de la chambre de Jeannine Léveillé.

«Ils ne pouvaient pas sortir. Le feu était pris dans la porte. Ma mère n'aurait pas sauté du deuxième étage», ajoutent d'une même voix Chantal et Johanne.

Questionner les policiers

Leur tante Diane a appris la terrible nouvelle à la télé. Au bulletin d'informations, elle a vu l'immeuble de sa soeur et de son frère en flammes, et a appris que deux personnes manquaient à l'appel. Elle s'est fait conduire sur place où, pleine d'appréhension, elle a vigoureusement questionné policiers et pompiers.

«J'ai finalement vu le détective. Je lui ai demandé: «Dites-le moi donc pour vrai, là. Est-ce que c'est eux ou pas qui sont disparus? " Il m'a répondu: «Oui, c'est eux autres»», se rappelle Diane Léveillé.

Régulièrement, les trois femmes parlent avec l'espoir que l'enquête aboutisse.

«Il y a des gens qui savent qui a fait ça. Qu'ils parlent donc. J'ai très hâte de faire mon deuil», ajoute-t-elle.

Même chose pour les filles de Jeannine Léveillé, pour qui l'automne 2012 a été pénible.

«Deux mois avant ma mère, il y a eu le meurtre de mon ami Denis Blanchette, au Métropolis. On était des amis depuis très longtemps. Ç'a fait beaucoup de choses pour moi», conclut la femme.