Dans la foulée du jugement qui a invalidé en novembre dernier la façon de délivrer les constats d'infraction des radars photo, deux demandes d'action collective ont été déposées.

Le 28 novembre, le juge de la Cour du Québec Serge Cimon a conclu que les constats d'infraction des cinémomètres reposaient sur une preuve déficiente, parce qu'elle était basée sur le « ouï-dire ». Le fait que le ministère public n'en a pas appelé de cette décision a incité l'avocat Joey Zukran, fondateur de la toute nouvelle entreprise Ticket Légal inc., à déposer rapidement une demande d'action collective, à la fin du mois de décembre. La représentante du groupe serait une femme qui a écopé d'une amende de 137 $ pour vitesse. L'avocat réclame le remboursement des amendes payées, ainsi que des dommages, pour tous ceux qui ont eu des constats d'infraction depuis le 30 décembre 2013.

L'autre demande a été déposée quelques jours plus tard par l'avocat Avi Levy, de Legal Logik inc., et aspire elle aussi au remboursement des amendes payées, auquel s'ajouteraient 100 $ pour troubles et inconvénients, ainsi que toute autre somme qui aurait été engagée. Cette requête vise à regrouper toutes les personnes qui ont reçu ou payé une contravention depuis l'instauration des cinémomètres, le 19 août 2009. Le représentant serait un homme qui a écopé d'une amende de 197 $ pour vitesse.

En matière de recours collectif, la règle de base s'apparente à celle du premier arrivé, premier servi. Mais ce n'est pas une règle immuable, de dire Me Levy.

« Il y a plusieurs demandes qui peuvent être déposées, et après, ce sera au tribunal de juger qui va être le plus apte à mener un recours comme ça. C'est une longue bataille, ça va prendre du temps, il y a beaucoup d'angles à couvrir. Il y a deux demandes actuellement, mais il ne faudrait pas s'étonner d'en voir une troisième et une quatrième. Ce sera au juge d'évaluer, » a-t-il dit à La Presse.

Il est à noter qu'une demande de recours collectif ne signifie pas que le recours ira de l'avant de façon certaine. Toute demande passe par une étape de filtrage, pour voir si la situation s'y prête et si les conditions sont respectées. C'est un juge qui décide. Après, l'affaire peut aller à procès ou faire l'objet d'un règlement.

CONFIANTS

Me Zukran se dit pour sa part confiant. Il affirme être encouragé par le fait que l'Alberta a remboursé 13 millions aux automobilistes en 2011 et que Winnipeg a fait la même chose, à hauteur de 1 million, en 2014. Dans le premier cas, il s'agissait d'une défectuosité rapportée pour un radar photo. Dans le second cas, c'est une erreur administrative, soit une mauvaise formulation sur des contraventions, qui a mené au remboursement. Ce n'est pas tout à fait la même chose qu'au Québec, puisque les remboursements avaient été effectués sans qu'il y ait de recours collectifs en ce sens, admet Me Zukran.

L'avocat considère par ailleurs que les radars photo sont une bonne chose, parce qu'ils permettent de réduire la vitesse et les accidents. Mais il faut que ce soit fait dans les règles.

PROBLÈME RÉGLÉ

Le coeur du litige dans cette affaire reposait sur le fait que l'agente qui délivrait le rapport d'infraction disait avoir personnellement constaté que toutes les composantes pour le délivrer étaient en place, notamment la présence d'un panneau de limitation de vitesse. Or, elle n'avait jamais visité les lieux de l'infraction. C'est un autre policier qui était chargé d'inspecter les lieux tous les sept jours pour voir si le panneau était là. Idem pour le bon fonctionnement de l'appareil, qui s'appuyait sur des tierces personnes.

Depuis, la situation a été réglée, selon le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Son porte-parole, Me Jean-Pascal Boucher, assure que des « ajustements ont été faits afin de présenter une preuve conforme avec la règle de droit ». Les cinémomètres sont toujours en fonction, et MBoucher rappelle que les conducteurs fautifs s'exposent à recevoir un constat d'infraction là où il y a des radars photo.