Pour la première fois, la Cour d'appel du Québec se penchera sur le droit de grève des étudiants : le tribunal a accepté, plus tôt cette semaine, d'entendre les arguments d'une association dans le débat qui l'oppose à un groupe de ses propres membres opposés au « boycottage » des cours.

Alors que le gouvernement Couillard a exclu la possibilité d'encadrer cette pratique, la décision pourrait avoir un impact profond sur d'éventuels mouvements de débrayage dans les cégeps et les universités du Québec.

L'AGEFLESH, qui regroupe les étudiants en sciences humaines de l'Université de Sherbrooke, a décidé de contester deux décisions rendues par la Cour supérieure au printemps dernier. Dans celles-ci, le juge Gaétan Dumas donnait raison à 13 étudiants antigrèves en interdisant le blocage des salles de classe et refusait de se retirer du dossier, tel que le lui demandaient les avocats de l'association.

« Les questions que soulèvent les deux requêtes méritent d'être soumises à une formation de la Cour », a écrit le juge Yves-Marie Morissette, de la Cour d'appel, en donnant le feu vert au dossier.

Une première

« C'est la première fois que la Cour d'appel va se pencher sur les éléments de la grève étudiante », s'est réjoui Giuseppe Sciortino, avocat de l'AGEFLESH. La Cour d'appel va devoir déterminer s'il y a vraiment un "droit éclatant" [expression utilisée par le juge Dumas] à assister à ses cours. Nous prétendons que non », a ajouté son collègue Félix-Antoine Michaud.

De l'autre côté du débat, c'est l'avocat Jean-François Nadeau qui représentera le groupe de 13 étudiants qui avaient gagné leur cause en première instance. « La Cour d'appel voulait que la question soit débattue devant elle », a constaté le procureur. Il a ajouté attendre le mémoire de Mes Sciortino et Michaud afin de savoir sur quoi allait spécifiquement porter leur appel. « Il y a aussi énormément de points de droit soulevés », a souligné Me Nadeau.

L'audience devant la Cour d'appel du Québec est prévue pour décembre prochain.

Le conflit entre le groupe de 13 étudiants et l'association étudiante était né pendant un court mouvement de débrayage à l'Université de Sherbrooke, survenu en mars et avril derniers. À la même époque, le ministre de l'Éducation François Blais écartait toute possibilité d'encadrer ce type de moyens de pression par le truchement d'une loi. « Nous ne croyons pas à ce droit. Il n'existe nulle part au monde. Nous n'allons pas légiférer en la matière », avait-il tranché.