Les écoles francophones en situation minoritaire ont droit à des installations scolaires de qualité équivalente à celles des écoles anglophones, a tranché vendredi la Cour suprême du Canada.

Dans un jugement unanime, le plus haut tribunal au pays a donné raison aux parents d'une école de la Colombie-Britannique qui réclamaient de meilleurs services.

La Cour suprême a conclu que la province a enfreint le droit constitutionnel à l'instruction de la minorité francophone en mettant à sa disposition des installations de piètre qualité.

Les parents des élèves de l'école Rose-des-vents affirmaient que l'établissement était «surpeuplé» et «moins facilement accessible» que les écoles de la majorité anglophone.

La Cour suprême s'est penchée sur la question de l'équivalence entre les installations des écoles de langue française minoritaire et celles des écoles de langue anglaise majoritaire.

«Pour donner effet aux droits garantis par l'art. 23, l'accent devrait alors être mis sur l'équivalence réelle plutôt que sur les coûts par personne et les autres indicateurs d'équivalence formelle», écrit la juge Andromache Karakatsanis au nom des sept juges qui ont siégé dans cette cause.

Car il est «primordial» que «l'expérience éducative des enfants de titulaires des droits garantis par l'art. 23 (...) soit de qualité réellement semblable à l'expérience éducative des élèves de la majorité linguistique», précise la juge ontarienne.

Cet article constitue «une balise importante de l'engagement du Canada envers le bilinguisme et le biculturalisme, élément fondateur de notre pays» - et l'un de ses «traits distinctifs» est «qu'il est particulièrement vulnérable à l'inaction ou aux atermoiements des gouvernements», peut-on lire dans le jugement.

L'avocat Mark Power, qui avait mené la bataille au nom du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique, estime que la décision forcera les ministères des provinces majoritairement anglophones à cesser «de minimiser ce droit aux immeubles».

Car les impacts de la décision rendue par le plus haut tribunal au pays ne se feront pas sentir uniquement entre les murs de l'école Rose-des-vents, selon lui.

«Ça va améliorer la position de négociation des commissions scolaires francophones» et signaler aux divers ministères de l'Éducation qu'ils ont «intérêt à financer» adéquatement les installations au lieu de dépenser ces sommes en frais juridiques, a résumé Me Power.

De manière plus large, il voit en ce jugement une victoire pour la francophonie au Canada.

«La recherche démontre qu'à l'extérieur du Québec, le français se transmet surtout à l'école. L'avenir du français à l'extérieur du Québec passe donc par les écoles», a expliqué l'avocat en entrevue téléphonique.

«Et quand les écoles sont trop petites ou trop mauvaises, les francophones préfèrent ne pas y inscrire leurs enfants. Et ça, à la longue, c'est de l'assimilation, ça mène à la disparition du français hors Québec», a argué Me Power.

La Cour suprême du Canada renvoie donc l'affaire à la Cour suprême de la Colombie-Britannique pour la prochaine étape de l'instruction de la requête, si la chose s'avère nécessaire.

Elle ordonne également au gouvernement britanno-colombien de rembourser aux plaignants les frais juridiques encourus.

Fondée en 2001, l'école Rose-des-vents est le seul établissement de langue française dans le secteur ouest de Vancouver.

Elle a une capacité d'accueil d'environ 200 élèves, mais on en dénombrait environ 350 en 2011.

L'espace de rangement y est insuffisant, ce qui a contribué à la propagation de poux chez les élèves, est-il indiqué dans le jugement de la Cour suprême du Canada.