La Cour suprême du Canada a accepté d'entendre l'appel du gouvernement fédéral relativement au statut de mineur d'Omar Khadr.

En octobre 2010, une commission militaire américaine avait condamné Omar Khadr à huit ans de prison pour cinq crimes de guerre commis en Afghanistan en juillet 2002, alors que le garçon était âgé de 15 ans. Or, Ottawa jugeait qu'en vertu des lois canadiennes, cette peine fait de lui un adulte et non un jeune contrevenant. Après son transfert au Canada, en septembre 2012, il a été incarcéré dans un pénitencier fédéral plutôt que dans une prison provinciale.

Dans une décision unanime rendue en juillet dernier, la Cour d'appel de l'Alberta a cependant rejeté cette interprétation. C'est ce jugement que la Cour suprême a accepté jeudi d'examiner, à la demande d'Ottawa.

Omar Khadr, un Torontois aujourd'hui âgé de 28 ans, a par ailleurs accepté de demeurer dans l'établissement pour adultes d'Innisfail, en Alberta. Ses avocats estiment que les programmes offerts au pénitencier fédéral sont plus intéressants que dans une prison provinciale.

Le problème réside plutôt dans le fait que M. Khadr demeure un prisonnier «à sécurité moyenne», ce qui réduit ses chances d'obtenir un jour une libération conditionnelle. Même s'il est actuellement admissible, ses avocats n'ont pas présenté de demande, de crainte qu'elle ne soit rejetée et qu'il faille attendre encore au moins deux ans avant de présenter une nouvelle demande.

Détenu depuis 2002 sur la base militaire américaine de Guantanamo, Omar Khadr a finalement accepté de plaider coupable aux États-Unis à cinq accusations de crimes de guerre - notamment de meurtre - et il a été condamné en octobre 2010 à une peine de huit ans de prison. La commission militaire a jugé l'accusé comme un adulte, même s'il était âgé de 15 ans au moment des crimes - une violation du droit international, selon certains juristes.

Après 10 ans d'incarcération à Guantanamo, le jeune homme a été rapatrié au Canada en septembre 2012 en vertu de la Loi sur le transfèrement international des délinquants. Or, cette loi exige que les autorités pénitentiaires déterminent l'équivalence au Canada d'une peine infligée à l'étranger.

Ottawa, qualifiant M. Khadr de terroriste non repentant, a plaidé que la peine infligée par la commission militaire américaine équivalait à cinq peines de huit ans de prison à purger simultanément, ce qui, au Canada, faisait d'Omar Khadr un criminel adulte. Les avocats du jeune homme soutenaient quant à eux qu'il avait été condamné à une seule peine globale de huit ans de prison, ce qui fait de lui un jeune contrevenant au sens des lois canadiennes.

Deux tribunaux de l'Alberta se sont rangés derrière les arguments des avocats de M. Khadr, mais Ottawa conteste maintenant ces interprétations en Cour suprême.

Un porte-parole du ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney, a indiqué jeudi dans un courriel que le gouvernement veut s'assurer que M. Khadr demeure dans un pénitencier fédéral, «où c'est sa place», et s'est réjoui de la décision de la Cour suprême d'entendre l'affaire. «Nous ne sommes pas d'avis qu'une peine pour jeune contrevenant soit appropriée», a indiqué Jason Tamming.

Les avocats de la défense, eux, ont été interloqués par la décision de la Cour suprême - après celle d'Ottawa d'en appeler d'un jugement unanime de la Cour d'appel de l'Alberta. Le comportement du gouvernement dans cette affaire, à grands frais pour les contribuables, «est une suite de gestes malveillants qui ne sont destinés qu'à montrer une attitude ferme face au crime», a soutenu Me Dennis Edney.