Une femme alléguant que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) en Colombie-Britannique n'a pas enquêté correctement sur une fusillade ayant mené à la mort de sa fille a reçu le feu vert pour poursuivre les forces policières. Une juge a rejeté l'argument d'Ottawa selon lequel la garantie des droits de Lisa Dudley inscrits dans la Charte des droits et libertés n'était plus pertinente après son décès.

Rosemarie Surakka a intenté ses démarches au nom de Mme Dudley, sa fille de 37 ans, qui est morte en septembre 2008.

L'avocate de Mme Surakka, Monique Pongracic-Speier, a dit croire qu'il s'agit du premier cas de l'autorisation d'une poursuite en vertu de la Charte après le décès d'un individu.

«La loi reconnaît généralement qu'un droit sans un remède est futile», a expliqué Me Pongracic-Speier lors d'une entrevue.

Mme Dudley se trouvait chez elle avec son partenaire, Guthrie McKay, lorsque tous deux ont été abattus. M. McKay a été tué sur le coup, et Mme Dudley s'est retrouvée paralysée.

Si un voisin a bel et bien composé le 911 pour signaler les coups de feu, la poursuite affirme que les agents de la GRC s'étant rendus sur place ne sont pas descendus de leur véhicule pour enquêter sur la fusillade, pas plus qu'ils n'ont interrogé les voisins ayant alerté les autorités.

Mme Dudley a finalement été découverte par un voisin, quatre jours plus tard, toujours vivante et consciente. Trois personnes ont par la suite été accusées en lien avec la fusillade, dont une a plaidé coupable.

Mme Surakka a intenté sa poursuite à l'automne 2011, mais Ottawa a tenté de faire rejeter l'affaire. Le gouvernement a argué que puisque Mme Dudley était décédée, elle ne disposait plus de droits en vertu de la Charte et que personne ne pouvait intenter une poursuite en son nom.

L'avocate de Mme Surakka a argué en cour que des poursuites doivent être permises dans des cas où la violation de la Charte prend fin avec la mort d'un individu afin de préserver et de faire respecter le droit à la vie.

La juge Heather Holmes lui a donné raison, et permet donc que l'affaire suive son cours.

«Selon moi, la demande de la plaignante est précisément le genre de demande novatrice, mais défendable qui devrait survivre à une demande d'annulation», écrit-elle dans sa décision.

Une porte-parole du ministère de la Justice, Lyse Cantin, a indiqué que le gouvernement examinerait le jugement et déterminerait s'il fera appel dans les 30 jours alloués à cet effet.

Au dire de l'avocate de la défense, il s'agit d'une cause importante.

«Si le droit violé est celui du droit à la vie et qu'il n'y a aucun moyen de défendre ce droit, alors cela semble ne pas correspondre à l'État de droit et aux principes constitutionnels», a-t-elle déclaré.

L'affaire a également poussé la GRC à modifier sa politique pour obliger ses agents à parler directement avec les gens appelant au 911.