Un ex-haut gradé de la SQ devenu consultant a été arrêté en catastrophe, hier, dans le cadre de l'enquête ministérielle sur de présumés abus de confiance et détournements de fonds secrets au sein du corps de police provincial.

Denis Despelteau, qui réside sur la Rive-Sud de Montréal, a été incarcéré en attendant sa comparution mardi.

Selon des informations obtenues par La Presse, c'est parce que Denis Despelteau s'apprêtait à quitter le pays que le Directeur des poursuites criminelles et pénales a décidé de presser le pas en déposant tout de suite des accusations contre lui. Le projet initial ne prévoyait aucune intervention dans ce dossier avant septembre, ont expliqué nos sources.

Le projet d'arrestation a été transmis ces derniers jours au ministère de la Sécurité publique, qui avait mis en place l'équipe d'enquête spéciale sur trois dirigeants de la SQ.

En décembre dernier, La Presse avait révélé que Richard Deschesnes, tout juste éjecté de son siège de patron de la SQ, Jean Audette, ex-chef des enquêtes criminelles, et Steven Chabot - tous des officiers au curriculum vitae impressionnant - étaient l'objet d'allégations de nature criminelle.

Allégations graves

Les informations qui avaient filtré évoquaient l'utilisation abusive de fonds secrets destinés aux opérations. Estimés à plus de 25 millions par an, ils servent normalement à payer des délateurs, la location d'appartements utilisés comme planques, l'organisation d'infiltrations secrètes ou de fausses transactions de drogue pour épingler des trafiquants, etc.

Or, des centaines de milliers de dollars auraient été «détournés» pour rétribuer Denis Despelteau, même si celui-ci avait des déboires avec le fisc, ainsi qu'une prétendue indemnité de départ à Steven Chabot. C'était justement Chabot qui devait autoriser les sorties de fonds de cette caisse secrète. «Aucune prime de départ ne peut être accordée par la SQ à l'un de ses employés», avait rappelé le ministre Stéphane Bergeron.

Ce sont des anciens policiers du SPVM, de la SQ et de la GRC nommés par le sous-ministre Martin Prud'homme qui mènent cette enquête délicate. Ils vérifient aussi l'hypothèse qu'une partie des surplus de la SQ auraient été dissimulés dans le compte bancaire d'une compagnie à numéro plutôt que d'être retournés au gouvernement.

Normalement, rien ne devait bouger dans ce dossier avant septembre prochain. Certains des anciens amis de Despelteau au sein de la police disent être surpris de ses intentions de fuir, d'autant plus qu'il a une famille au Québec, incluant des parents âgés.

Denis Despelteau a aussi des ennuis avec le fisc, qui lui réclame 168 241$. Devant cette créance, il a déclaré faillite, comme il l'avait déjà fait en 2007 à la suite d'une réclamation de Revenu Québec pour 234 715$ d'impôts impayés.

Un négociateur influent

Denis Despelteau, qui continuait d'en mener large au quartier général depuis sa retraite, avait obtenu en janvier 2010 un contrat de gré à gré pour «agir à titre de négociateur en matière de relations de travail auprès de la Sûreté du Québec».

En 2008, l'ex-ministre Jacques Dupuis l'avait décrit en commission parlementaire comme «quelqu'un qui est extrêmement efficace, quelqu'un qui est très crédible [avec une] belle notoriété dans le milieu».

Selon certaines informations, il pourrait y avoir prochainement d'autres rebondissements visant les autres ex-dirigeants de la SQ, Richard Deschesne et Jean Audette, actuellement suspendus avec salaire, et Steven Chabot, qui est à la retraite.