L'an dernier, un nombre record de Canadiens ont été arrêtés à l'étranger pour des affaires de terrorisme ou de sécurité nationale, révèlent des documents obtenus par La Presse.

Selon le ministère des Affaires étrangères, dix citoyens canadiens ont été arrêtés en 2014 par les autorités d'autres pays pour des infractions qui, selon ces pays, touchaient le terrorisme ou menaçaient la sécurité nationale, contre six en 2013 et un en 2012. Trois autres ont été envoyés derrière les barreaux depuis le début de 2015.

Mais il y a aussi Mohamed Fahmy, journaliste canado-égyptien en poste au Caire, arrêté en 2013 et condamné en 2014 à sept ans de prison. On l'accusait d'avoir fraternisé avec les Frères musulmans, une organisation redevenue terroriste pour le nouveau gouvernement égyptien. La chaîne Al-Jazira, dont il était chef de bureau, avait couvert la répression contre les partisans de l'ancien président islamiste, ce qui a déplu au gouvernement. M. Fahmy a été libéré après 400 jours derrière les barreaux, mais il est toujours en attente d'un nouveau procès. Plusieurs organismes de défense des droits estiment qu'il est persécuté pour ses opinions.

«Le problème, c'est que ces gens sont arrêtés selon les lois du pays où ils se trouvent. Pas les lois canadiennes, prévient Hilary Homes, responsable des dossiers de sécurité et de droits de la personne chez Amnistie internationale Canada. Ce qu'un pays considère comme du terrorisme n'est pas la même chose ailleurs. Il y a des endroits où le simple fait d'insulter le roi est considéré comme une menace à la sécurité.»

Que disent les chiffres?

Que traduisent alors les chiffres obtenus par La Presse? Les Canadiens sont-ils plus nombreux à participer à des activités terroristes? Ou y a-t-il simplement une plus grande intransigeance de la part des gouvernements étrangers?

Difficile à dire sans connaître l'identité des personnes visées par les arrestations ou le pays où elles ont été interceptées, informations que le gouvernement fédéral refuse de divulguer pour des raisons de confidentialité.

«Il faut être prudent dans la lecture de ce qui est de relativement petits nombres. Néanmoins, je pense que le risque que des Canadiens participent à des activités extrémistes violentes à l'étranger a augmenté de façon significative au cours des dernières années, note Rex Brynen, professeur de sciences politiques à l'Université McGill. Ce qui se passe au Moyen-Orient est une des principales raisons pour cela: des groupes comme l'État islamique (EI) cherchent activement à recruter des combattants étrangers, que ce soit pour combattre dans des guerres locales ou pour d'éventuels actes de terrorisme international. La coopération internationale pour résoudre ce problème a augmenté, mais le problème a augmenté aussi.»

Pensons seulement à ce groupe d'élèves du collège de  Maisonneuve partis en janvier grossir les rangs de l'EI et dont la police a depuis confirmé la présence en Syrie.

Selon Hilary Homes, il y a un peu de tout. «Comme au Canada, plusieurs États ont élargi leurs définitions du terrorisme», dit-elle. Elle ajoute qu'il est aussi possible que plus de Canadiens s'adonnent à des activités terroristes.

«L'important est que ces gens reçoivent les services consulaires sans discrimination [malgré la nature des accusations], dit Mme Homes. Sans les identités et les pays, c'est difficile de leur venir en aide, de savoir s'ils ont droit à un procès équitable ou même s'ils ont accusés de quoi que ce soit ou simplement détenus.»

- Avec la collaboration de William Leclerc